Aujourd'hui
Le « 7 » l’annonçait en début de semaine : les seize étudiants haïtiens tant attendus sont arrivés en France, le mercredi 1er septembre. A Poitiers, ils se formeront toute l’année afin de remplacer les cadres disparus lors du terrible séisme qui a frappé l’île, le 12 janvier dernier.
Daniel Joseph venait de quitter l’Ecole normale supérieure de Portau-Prince quand le séisme a frappé l’établissement. Il était 15h, ce 12 janvier 2010. « Des gens que l’on croisait au quotidien sont morts ce jour là. Moi-même, j’ai perdu deux cousins », raconte ce jeune homme de 26 ans, dans un français impeccable (avec le créole haïtien, le français est la langue officielle d’Haïti). Avec l’exode rural, chaque famille haïtienne possédait un membre dans la capitale, entièrement détruite. Au moment de la catastrophe, Mario Mauricette, 28 ans, était lui-même retourné en province pour rendre visite à ses parents. Son village de Petite Goâve a aussi été durement touché. Et comme beaucoup, il a attendu « trois mois » avant de dormir à nouveau dans la demeure familiale, pourtant préservée, de peur que «tout cela recommence ».
Une bourse d’un an
Aucun expert n’avait prévu le tremblement de terre. 230 000 personnes sont décédées, foudroyées dans leur quotidien. Parmi les victimes, de nombreux enseignants, des cadres... Bref, les intellectuels qui permettent à toute société de s’organiser. Daniel, Mario et les quatorze autres étudiants haïtiens arrivés à Poitiers, le mercredi 1er septembre, ont vocation à les remplacer. La France, le Canada, les Etats-Unis ont spontanément proposé d’accueillir, durant six mois, l’élite haïtienne de demain. Mais seule l’université poitevine (avec le soutien du Crous) a choisi de puiser dans la trésorerie de sa fondation pour leur offrir une bourse d’un an. Leurs parents sont paysans et vivent de petits boulots. Dans une société insulaire où la majorité des jeunes restent analphabètes, eux sont lauréats de sciences, d’anglais, d’histoire ou de lettres. Ces étudiants haïtiens ont un rôle à jouer. «On ne pensait pas venir un jour en France. Surtout après le séisme. La capitale est détruite, le palais national et l’université sont rasés, plus d’un million de personnes habitent sous des tentes... Nous sommes des privilégiés », souligne David Nocent, 26 ans, étudiant en chimie.
Carpe diem
Comment reconstruire un pays qui peut être anéanti du jour au lendemain ? Très croyants, une majorité d’Haïtiens reste persuadée que Dieu, pour une raison indéterminée, a souhaité cet événement. Or, sa volonté est inexorable. Tout est à refaire. Désorientés, Mario, Daniel et David ne se posent aucune question. Ils aspirent à un peu de confort, se concentrent sur leurs études et vivent au jour le jour. « Dans un an, on verra bien », concluent-ils.
À lire aussi ...