Les éducateurs de rue « invisibles au service des invisibles »

Essentiels à la vie des quartiers, les éducateurs de prévention spécialisée accompagnent les jeunes avec humilité et discrétion. A Châtellerault, ils sont cinq à œuvrer pour le compte de l’Adsea 86.

Charlotte Cresson

Le7.info

Ils exercent un métier de l’ombre. Aussi discrets qu’indispensables, les éducateurs de prévention spécialisée, ou « éducateurs de rue » mandatés par l'Adsea 86, jouent un rôle clé auprès des jeunes des quartiers populaires. A Châtellerault, Sylvie et Sébastien travaillent depuis quatre ans et demi aux Lac-Renardières. « La situation diffère selon les quartiers. Les besoins des jeunes d’ici ne sont pas les mêmes que ceux de Châteauneuf ou d'Ozon », insiste Sylvie. Lors de leur arrivée, ils ont dû se faire accepter. « Quinze éducateurs se sont succédé avant nous, alors certains jeunes s’attendaient à ce que l’on finisse par partir nous aussi. Et puis beaucoup pensaient à tort que nous étions des éducateurs envoyés par des institutions. » Contrairement à leurs homologues travaillant pour la justice, la prévention spécialisée repose sur la libre adhésion du public et des professionnels. Une relation de confiance doit donc se créer dans le temps. Atypique et non institutionnelle, la prévention spécialisée est une ressource pour les jeunes. « Ils n’ont pas de porte à pousser, on est sur le quartier, on va à leur rencontre. » Dans le respect de l’anonymat, les éducateurs interviennent auprès de publics marginalisés ou qui risquent de l’être. « Nous sommes des invisibles au service des invisibles », ajoute Sébastien. 


Donner des clés

Les jeunes aidés par l’Adsea 86 ont entre 6 et 25 ans. Le terme « prévention » prend ainsi tout son sens et diffère de la médiation « Nous mettons des choses en place pour que les situations de crise n’arrivent pas. Pendant les émeutes, nous étions présents pour apaiser et comprendre la colère, mais de manière générale nous intervenons en amont », précise Christophe Thurieau, chef de service à l’Adsea 86. Pour repérer les difficultés le plus tôt possible et instaurer une relation de confiance pérenne, Sylvie et Sébastien encadrent notamment des sorties à vélo avec des élèves de CM2. Des chantiers loisirs et des excursions sont également proposés pour « sortir les jeunes du quartier ». Les éducateurs remettent aussi les plus âgés d’entre eux sur les rails en les aidant dans leurs démarches administratives et par le biais de chantiers éducatifs. Ces travaux rémunérés permettent aux bénéficiaires, souvent en marge, de 
« retrouver confiance en eux ».
« Ces chantiers sont multiformes et sont souvent réalisés pour le quartier. Le regard des habitants change et on sent également une certaine fierté chez eux. En plus, ce qu’ils font n’est pas dégradé car les riverains savent que c’est l’œuvre de jeunes d’ici », explique Sébastien. Depuis la récente annonce de la baisse de subvention départementale, les éducateurs de l’Adsea 86 sont « dans le brouillard ». A Châtellerault, un poste a été supprimé, ce qui pousse les professionnels à travailler sur plusieurs quartiers à la fois.

DR Adsea 86

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