Aujourd'hui
Le menu de Sébastien Boireau
Chef du restaurant gastronomique Papilles, à Poitiers, Sébastien Boireau vous propose un repas de fête réussi pour tous les porte-monnaie.
Ce jeudi, vous donnerez une visio-conférence sur le thème Laïcité(s) ? Pourquoi le « s » à laïcité et le point d’interrogation ?
« Il y a à l’évidence des conceptions différentes. Mais pour moi, il n’y a qu’une seule laïcité, en l’occurrence celle produite par notre Histoire et exprimée dans des principes de droit. Il faut mieux les faire connaître. »
Le secrétaire général de l’Observatoire de la laïcité et vous-même avez été mis en cause après l’attentat contre Samuel Paty. Vous seriez trop complaisants selon vos détracteurs...
« Certains seraient trop souples, d’autres intraitables ? Ce débat est ridicule, on adore prendre des postures en France. La laïcité devrait être de combat, inclusive, ferme... La réalité, c’est qu’à chaque fois que vous lui accolez un adjectif, vous la truquez. Nous avons des histoires, des parcours, des métiers différents. Mais nous devons tous nous rassembler derrière ce qui est autorisé et ce qui est interdit. »
Dans un communiqué publié le 20 octobre, l’Observatoire indique que « la vraie vie, ce n’est pas Twitter ou Facebook ». Les réseaux sociaux hystérisent-ils le débat autour de la laïcité ?
« C’est un gros problème. La loi contre la haine en ligne nous paraît absolument nécessaire à l’Observatoire. Je sais que le gouvernement et la députée (LREM) Laëtitia Avia travaillent sur une nouvelle version. Qualifier quelqu’un d’islamophobe ou d’islamo-gauchiste sur les réseaux sociaux ne fait pas avancer les débats. C’est même une escalade dangereuse. Parlons plutôt, collectivement, d’actes anti-musulmans, d’actes anti-chrétiens... »
Si vous étiez enseignant, montreriez-vous des caricatures du Prophète en classe ? Plus largement, comment enseigner le fait religieux à l’école ?
« La tâche des enseignants est extrêmement difficile. Aujourd’hui, on demande à l’école de transmettre des compétences, de connaître et faire respecter les valeurs républicaines, de remplacer des parents en grande difficulté, etc. La laïcité, c’est peut-être la clé de tout parce qu’elle dit comment on fait pour se respecter et vivre ensemble. Ce que je regrette, c’est que 81% des enseignants n’aient pas de formation. Un module unique doit leur être consacré. Après, c’est leur liberté pédagogique de s’appuyer sur tel ou tel document pour évoquer la liberté d’expression. »
La secrétaire d’Etat à la Jeunesse Sarah El Haïry a rencontré une centaine de jeunes à Poitiers, fin octobre, pour évoquer les religions (cf. n°500). Le débat a tourné au dialogue de sourds...
« Je ne m’exprimerai pas sur ce cas particulier puisque des enquêtes sont en cours. Ce que je peux simplement dire, c’est qu’il faut préparer les jeunes au débat sans briser leur liberté de parole. On est tout à fait libre de critiquer une loi (celle de 2004 avait été qualifiée d’islamophobe, ndlr). Mais on doit l’appliquer. Je n’accepte pas qu’on parle d’islamophobie d’Etat. C’est inadmissible et inacceptable. Encore une fois, la pédagogie se construit. Il ne faut pas infuser la laïcité par le haut, mais la faire comprendre par des exemples concrets. »
Après chaque attentat, c’est pourtant la même escalade de mots, de lois... Comment faire face ?
« Il faut être extrêmement précis et rigoureux dans le choix des mots, qui peuvent se transformer en armes de discrimination à l’égard de ceux qui ne pensent pas comme nous. En France, nous faisons souvent des lois d’émotion. C’est une manie. Le point sur lequel nous devons être fermes, c’est de ne pas toucher aux principes de la loi de 1905. C’est un point d’équilibre qui résiste au temps, notre trésor républicain. »
(*) A l’initiative du Cercle Condorcet et de la FCPE de la Vienne. Visio-conférence jeudi, à partir de 18h45 depuis l’Espace Mendès-France. Inscription sur emf.fr/34662. Il rencontrera les élus de Poitiers et des lycéens du Bois d’Amour jeudi et vendredi.
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