mardi 24 décembre
Avec Au nom de la terre, Edouard Bergeon livre un film à la fois bouleversant et terrifiant sur la détresse du monde paysan. Le récit de la vie de son père, joué par un Guillaume Canet magistral.
1977. Pierre Jarjeau revient du Wyoming pour reprendre l’exploitation familiale. Son père (bourru) lui cède à prix d’or. C’est le temps du bonheur avec son épouse, des promesses de diversification d’activité et de croissance. Vingt ans plus tard, le paysan a perdu ses cheveux autant que ses illusions. Ses épaules ploient sous le poids des dettes. Ultime coup du sort, un incendie ravage le bâtiment d’élevage des chevraux. C’est le début de la fin pour Pierre, au bout du rouleau. Il s’enfonce inexorablement dans une profonde dépression, malgré le courage et l’amour de son épouse et de ses enfants… Jusqu’à commettre l’irréparable.
Pour son premier long-métrage, le réalisateur poitevin Edouard Bergeon livre un film poignant, nourri de sa propre histoire familiale. L’impeccable Guillaume Canet (Pierre Jarjeau) campe le rôle de son propre père Christian Bergeon, disparu en mars 1999. Anthony Bajon (Thomas Jarjeau) se révèle magistral en ado contraint de grandir trop vite. Quant à Veerle Baetens (Claire Jarjeau), elle suscite l’admiration par sa capacité de résilience.
Ce qui frappe dans Au nom de la terre, c’est le contraste entre la beauté des paysages ruraux et la désespérance des agriculteurs, broyés par le système et une logique qui leur échappe. Les rapports humains -notamment entre Pierre et son père Jacques- sont durs. Cette fresque sombre interpelle et émeut sans jamais verser dans le pathos. Elle met juste en lumière tous ceux qui disparaissent sans faire de bruit, encore aujourd’hui.
Drame d’Edouard Bergeon, avec Guillaume Canet, Veerle Baetens, Anthony Bajon, Rufus (1h43).
Edouard Bergeon, réalisateur d’Au nom de la terre : « Dans mon film (*), il n’y a pas d’agribashing, juste le reflet des quarante dernières années dans l’agriculture. Il faut arrêter avec un certain modèle avec toute cette chimie qui tue la terre et les paysans. Tout est dans le sous-titre, chacun en fait la lecture qu’il veut. Les gens sont touchés, forcément, ils ont les yeux rougis à la fin de la séance. Moi, ce qui m’émeut, c’est de les voir s’émouvoir. Il faut rappeler qu’un agriculteur se donne la mort chaque jour en France et qu’un tiers vit avec moins de 350€ par mois. Il n’y a pas de pays sans paysan. Il est temps que le grand public s’en rende compte. »
(*) Journaliste, Edouard Bergeon avait réalisé en 2012 un documentaire intitulé Les fils de la terre, pour France 2. Guillaume Canet a révélé qu’il souhaitait porter cette histoire sur grand écran. Le réalisateur poitevin l’a finalement « devancé ».
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