Hier
Lundi dernier, le ministre de l’Education nationale s’est vu remettre un rapport sur l’enseignement des mathématiques en France. Fruit d’un long travail mené par Cédric Villani et Charles Torossian, il recommande notamment une meilleure formation des enseignants et de nouvelles méthodes d’apprentissage.
« Quand on m’interroge sur mes études et que je réponds que je suis en fac de maths, les gens me regardent toujours avec des yeux écarquillés. » Martin Lepage s’est habitué à passer pour « un mec bizarre », lors des soirées étudiantes. Ce jeune homme de 20 ans, en deuxième année de licence de mathématiques, a choisi sa voie par vocation. « Je rêve de devenir chercheur depuis que j’ai 10 ans, explique-t-il. Tout au long de ma scolarité, j’ai fait passer les maths avant le reste. La majorité de mes camarades pensent que cette matière est un fardeau. Nous ne voyons pas cette discipline à travers le même prisme. »
En France, les mathématiques se sont taillées une « réputation de matière complexe », entretenue par « des discours médiatiques trop critiques », note Valentin Farne, professeur de mathématiques en collège. Au fil des ans, le volume hebdomadaire d’heures consacrées à leur enseignement dans le secondaire a baissé, si bien que la France se retrouve aujourd’hui à la 25e place du classement européen Pisa, en matière de compréhension des maths. En 2003, elle occupait la 12e place. « Les élèves voient aujourd’hui les mathématiques comme quelque chose de déconnecté de la réalité, analyse Youssef Barkatou, responsable du master Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation (Meef) parcours maths, à l’université de Poitiers. Le niveau a considérablement baissé depuis dix ans, en partie à cause du manque de temps consacré aux maths. Le problème, aujourd’hui, c’est que les étudiants arrivent à la fac avec des lacunes, que beaucoup n’arrivent pas à combler. Le taux d’échec en Licence et Master ne cesse d’augmenter. »
« Apporter un côté ludique et concret »
Face à ces constats pour le moins alarmants, universitaires, enseignants et politiques ont décidé de faire front. Lundi dernier, les célèbres mathématiciens Cédric Villani et Charles Torossian ont remis un rapport sur l’enseignement des mathématiques au ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer, dans lequel ils livrent vingt-et-une propositions pour redonner aux élèves français le goût des maths. Calcul mental, formation des enseignants, équipements plus adaptés, nouvelles méthodes d’apprentissage... « La clé, c’est d’apporter un côté ludique et concret, reprend Youssef Barkatou. En désinhibant les élèves et en leur montrant que les maths sont une discipline propice à l’imagination et à la créativité, nous parviendrons à susciter de nouvelles vocations. » Dans notre société moderne, « les mathématiques sont partout ». Et par conséquent indispensables.
L’enseignant-chercheur poitevin fait partie de l’association MATh.en.JEANS, qui promeut la discipline en rassemblant élèves, enseignants et universitaires au sein d’ateliers communs. « Tout au long de l’année, nous travaillons par petits groupes sur un problème donné, en lien avec le quotidien. Comment découper une pizza en un minimum de mouvements ? Comment alimenter un quartier en énergie ? » En ayant recours à des applications concrètes, les membres de l’association parviennent à « nourrir la réflexion des élèves ». En Nouvelle-Aquitaine, 522 jeunes volontaires participent cette année à l’opération. Du 23 au 25 mars prochains, ils se rassembleront sur le campus, à Poitiers, pour présenter leurs travaux. Une manière de donner du sens aux maths. Et d’attirer de nouveaux étudiants sur les bancs de la fac.
À lire aussi ...