Un maintien aux forceps

En tête de vingt longueurs au cœur du troisième quart-temps, le PB 86 a joué à se faire peur dans le money-time, avant de finalement sauver sa peau en Pro B à l’ultime seconde.

Nicolas Boursier

Le7.info

Il ne reste plus que vingt-deux secondes au compteur. Devant un public en transe, la banderille du fantasque mais talentueux Racine vient de faire mouche à sept mètres en coin. Saint-Quentin est revenu à deux longueurs du PB. L’apoplexie guette ! Un lancer franc réussi pour Ona Embo, deux pour Romain. 92-91, neuf secondes, huit dixièmes à jouer. Remise en jeu pour Thinon. Trop lent ! Balle à l’adversaire. Le « pick and roll » demandé par l’entraîneur, Thomas Giorguitti, se heurte à la défense poitevine. Smith doit se résoudre à servir Williams, dont la tentative à trois points manque de conviction. Raté. Le PB est sauvé. Vive le PB !

Voici résumé, comme si vous y aviez assisté, l’épilogue suffocant vécu ce soir par Saint-Eloi. Conclusion heureuse d’une partie totalement à l’image de la saison des troupes de Ruddy Nelhomme : tantôt euphorique, tantôt calamiteuse.

Ce match n’aura donc pas échappé à la règle de l’inconstance. L’entame avait d’abord roulé sur les rails des promesses. Sans autre obstacle que l’entêtement de Saint-Quentin à ne pas céder le moindre pouce de terrain et à son sculptural intérieur, Lesieu, à souffler le chaud de part et d’autre du parquet. Le PB se montrant adroit, dans le sillage d’Ona Embo et Greer, l’opposition était plaisante à souhait.

Kanté et Greer font le show

Elle s’avérait même hyper séduisante, lorsque le rentrant Kanté (8e), d’un « coast to coast » inarrêtable et d’un trois points hors-normes, offrait un premier matelas à ses couleurs (22-17). La perte de balle, stupide, qui s’ensuivait, jetait certes un voile sur la prestation sans tache des Poitevins. Surtout à cinq secondes de la sirène.

Qu’importe ! Au retour sur le parquet, le PB redéployait ses ailes. Kanté, encore, et Ona Embo derrière la ligne, faisaient sonner l’artillerie (28-21). Quelques approximations en défense maintenaient les joueurs de l’Aisne dans le jus, mais ce PB-là était, lui, dans le ton. A l’image du jeune Joseph, plus réaliste sous le cercle que Fitzgerald et Ogide réunis.

Les deux recrues étrangères de l’été payaient cash cette indigence d’un séjour prolongé sur le banc. De là, ils pouvaient assister au récital de Kanté, véritable catalyseur d’énergie de cet acte inaugural (17 points, 19 d’évaluation). Mais aussi, hélas, à la belle résistance saint-quentinoise, ourdie par un Williams peu économe en efforts et un Lesieu toujours aussi solide au combat.

La lumière Greer puis le trou noir

Malgré une copie autrement plus fournie que celle du match contre Nantes, quinze jours plus tôt, le PB ne parvenait donc pas à se défaire d’un hôte collant au possible. Ah, sale bête !

Au virage de la pause (47-43), tout, ou presque, était donc à faire. Par deux fois, Greer, à trois points, puis Soliman, entretenaient la flamme. 55-45 : voilà qui devenait enfin intéressant. Et un troisième obus de Greer. Show devant ! Saint-Eloi pouvait exulter. D’autant que Gay se mélangeait les pinceaux sur une reprise d’appui. Fitzgerald, enfin libéré par Nelhomme, concrétisait l’offrande (52-45, 24e), avant de ressortir pour trois fautes. Ona Embo se mettait au diapason, et c’est toute l’équipe adverse qui se noyait dans le marasme (67-47).

Seul au monde, Poitiers n’avait dès lors qu’un quart d’heure à maîtriser pour sauver sa peau en Pro B. Et même dix minutes après que Guillard, impérial au rebond, eut préservé, au gong du troisième quart-temps, un crédit d’onze points aux siens (74-63)

Joumard à la mène, Fitzgerald et Soliman associés dans la surface de vérité… Telle était la configuration, inédite, de l’équipe priée de lancer le dernier round. Mauvaise pioche,  car d’un coup d’un seul, de perte de balle en choix étrange (aïe Joumard !), les « blancs » laissaient revenir la meute à… cinq petites longueurs (74-69). Et même à une sur un exploit de Racine (76-75). Il fallait, là encore, un extraordinaire Greer par-delà la ligne pour maintenir le cap et le retour au premier plan de Fitzgerald pour ne pas sombrer (83-78).

La tension était désormais à son paroxysme, jouant des tours à la lucidité des dix acteurs. Au petit jeu des « ratés », le PB s’en sortait à meilleur compte. Jusqu’à ce que Racine, encore lui, n’entre un « 3 points » improbable de la touche. 87-85. Vingt-deux secondes à jouer. Devinez la suite…

 

Photo Mickaël Planès

 

La fiche
Salle Jean-Pierre Garnier à Saint-Eloi. 2204 spectateurs. Arbitrage de MM. Kerisit et Murillon. Poitiers Basket 86 - Saint-Quentin : 92-91. Mi-temps : 47-43. Score par quart-temps : 22-19, 25-24, 27-20, 17-18).
PB86 : Ona Embo 15, Harley 11, Greer 16, Soliman 8, Fitzgerald 13, puis Ogide 0, Thinon 0, Kanté 17, Joseph , Guillard 5, Joumard 0. Entraîneur : Ruddy Nelhomme.
Saint-Quentine : Bah 8, Romain 10, Smith 8, Williams 4, Lesieu 15, puis Siggers 11, Gay 14, Correa 4, Racine 17. Entraîneur : Thomas Giorguitti.

 

Ils ont dit 

Ruddy Nelhomme, entraîneur du PB 86 : « Ce match est en tous points le reflet de notre saison. Il a été marqué par une extrême inconstance, entre des pertes de balle improbables et des phases de jeu offensif exceptionnelles. Nous nous maintenons, mais j’avoue ma frustration. Je m’attendais à une toute autre saison. Il va falloir repenser à tout cela, réfléchir sur les erreurs commises et bâtir pour l’avenir.  Je me donne deux à trois semaines pour cela. »

Thomas Giorguitti, entraîneur de Saint-Quentin : « Je suis partagé entre la déception du résultat et la satisfaction d’avoir vu mes joueurs se battre comme de beaux diables pour revenir dans la partie, après le trou d’air du troisième quart. Poitiers et nous n’avons pas réalisé les objectifs que nous nous étions fixés. Pourtant, sur le papier, il y a du beau monde. C’est la preuve que dans ce championnat, rien n’est acquis. L’essentiel, c’est d’apprendre de ses erreurs. Or, je crois que j’ai appris. »

Jeff Greer, ailier et capitaine du PB 86 : « C’était un match fou, contre une formation qui aime l’offensive. Nous avions à cœur de montrer à notre public que nous pouvions jouer en équipe. Nous l’avons fait, malgré de très grosses frayeurs. Le maintien est assuré, mais dieu que cette saison fut compliquée. C’est vraiment un soulagement que d’arriver au bout. »

Lamine Kanté, ailier du PB 86 : « Ma série de points ? Bah, c’est tout moi, ça. Je joue à l’enflammade. Plus sérieusement, je me fiche un peu de la manière dont on a joué. L’important, c’est le maintien. Après toutes les emmerdes qu’on a connues, ce n’est que justice. Le reste, ce soir, est accessoire. »

 

 

 

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