L'effet LGV en chiffres

Doctorant à la Faculté de sciences économiques, Etienne Fouqueray dissèque, depuis deux ans, les retombées économiques des travaux de la LGV Sud-Europe-Atlantique dans la (grande) région. Le « chantier du siècle » aurait permis de faire reculer le chômage de 0,4% en Poitou-Charentes. Décryptage.

Arnault Varanne

Le7.info

La LGV a-t-elle vraiment contribué à la croissance économique, entre 2011 et 2013 ?
Concessionnaire de la Ligne à grande vitesse, Lisea a beaucoup communiqué sur le montant global du chantier, soit 7,8 milliards d’euros. En réalité, cette somme (*) correspond d’assez loin à l’argent réellement englouti sur les territoires traversés par l’infrastructure ferroviaire. Dans la période de référence -mars 2011-mars 2013-, sur 2,68 milliards d’euros d’injection brute dans les trois régions traversées (*), seuls 826 millions ont vraiment profité à l’économie locale. Bien sûr, cette somme a eu un effet multiplicateur. Le reste de la manne a « fuité », notamment parce que beaucoup de sous-traitants importants ne sont pas implantés en Poitou- Charentes, dans le Centre ou l’Aquitaine. « A titre d’exemple, le numéro 1 mondial des ouvrages d’art, Matière, a son siège dans le Cantal. Les rails ont été fabriqués en Lorraine… », illustre Etienne Fouqueray.

Quelle valeur ajoutée le chantier a-t-il apportée à la région ?
La LGV a contribué à augmenter le PIB picto-charentais de 0,5% par an, toujours entre 2011 et 2013, « soit une valeur ajoutée de 213M€ chaque année », explique Etienne Fouqueray. Qui indique au-delà qu’un euro injecté dans la construction de la ligne en Poitou-Charentes a généré 0,87€ de valeur ajoutée.

Y’a-t-il eu un effet LGV manifeste sur l’emploi ?

Là-dessus, aucun doute ! Selon l’étude d’impact, le constructeur a employé 2039 équivalents temps plein par an, toujours entre 2011 et 2013, sachant que 1338 emplois ont été créés par les sous-traitants et fournisseurs. Autre statistique intéressante : 610 emplois ont été « générés », au titre de la consommation des salariés du chantier. « Il y a eu un effet de relance locale, assure l’économiste, mais qui a surtout permis de maintenir des emplois. » Le taux de chômage aurait tout de même baissé de 0,4 point en Poitou-Charentes, sous le seul effet de la LGV SEA. La croissance du nombre de demandeurs d’emplois a surtout été contenue dans les zones proches du tracé.

Que sont devenus les salariés embauchés en CDIC, soit pendant la durée des travaux de terrassement ?
Etienne Fouqueray et quatre étudiants travaillent précisément sur une nouvelle étude consacrée à ces salariés, recrutés et formés localement, dont le contrat s’est achevé il y a plus de six mois. Cent soixante-dix personnes ont déjà répondu au questionnaire. Mais le futur doctorant préfère attendre septembre, avant de livrer des conclusions définitives sur la trajectoire de ces salariés. Il réalise la même enquête auprès des sous-traitants. Pôle Emploi Poitou-Charentes bénéficie de données plus factuelles. Sur les 734 ex-salariés de Cosea (constructeur) ou ses soustraitants accompagnés par ses soins, 49% sont « en emploi ». « Ce qui signifie qu’ils ont décroché un CDI, CDIC ou sont en période d’essai… », précise Pascale Malé. « 1300 autres sont sortis du dispositif et ont sans doute retrouvé un emploi. Le bilan est plutôt positif », conclut le chef de projet « LGV SEA » à Pôle Emploi Poitou-Charentes.

(*) Montant des travaux engagés en mars 2013. L’étude complète est à retrouver sur le site www.lgv-sea-tours-bordeaux.fr ou sur hal.archives-ouvertes.fr

En deux mots

Doctorant à la Faculté des sciences économiques de Poitiers, Etienne Fouqueray bénéficie de fonds de l’Association nationale de la recherche et de la technologie et de Lisea, concessionnaire de la LGV, au titre de son Observatoire socio-économique. Il achèvera sa thèse Cifre à la mi-2016. « J’ai travaillé en toute indépendance,
en ayant accès à toutes les données du constructeur. Je n’ai eu aucun problème de diffusion d’informations »
, assure-t-il.

 

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