Anorexie, la mode coupable ?

Trouble du comportement alimentaire, l’anorexie touche en grande majorité les adolescentes. Le monde de la mode est bien souvent jugé coupable de valoriser la maigreur excessive. Le professeur poitevin Ludovic Gicquel nous livre son analyse.

Florie Doublet

Le7.info

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 Le 18 mars, l’Assemblée nationale a rejeté un amendement au projet de loi santé interdisant aux mannequins jugés « dénutris » de défiler. Porté par Olivier Véran, ce texte avait pour objectif de lutter contre l’anorexie. La deuxième proposition déposée par le député socialiste et sa consoeur, Catherine Coutelle, a eu plus de chance. Elle stipule que « la politique de santé contribue à la prévention et au diagnostic précoce de l’anorexie mentale et des troubles des conduites alimentaires, notamment en luttant contre la valorisation de l’extrême minceur ».

En France, entre 30 000 et 40 000 personnes souffrent d’anorexie. Dans plus de 90% des cas, il s’agit d’adolescentes. « C’est une période de forte vulnérabilité, estime le pédopsychiatre poitevin Ludovic Gicquel. Les jeunes femmes voient leur corps changer. C’est un grand bouleversement. » Un bouleversement d’autant plus difficile à accepter lorsque tous les médias associent le bonheur à une certaine image du corps… « Il n’y a qu’à regarder les publicités à la télévision ou dans les magazines, les personnes qui semblent heureuses sont forcément minces… »

Le monde de la mode entretient volontiers ce cliché… En 2009, Karl Lagerfeld, célèbre couturier de la maison Chanel, affirmait que « personne ne voulait voir de femmes rondes » sur les podiums. Les marques de luxe ne sont pas les seules à se montrer discriminantes. Dans le prêt-à-porter, certaines enseignes démarrent leur collection « grande taille » à partir… du 40. « Le message transmis au monde entier est clair: « Le standard de la beauté, c’est ça ! », affirme le Pr Gicquel. Cependant, même si le mannequinat valorise la maigreur, il ne rend pas anorexique. »

Une spirale infernale

Les causes de cette maladie mentale sont « multifactorielles ». « Elle prend racine dans la petite enfance. Des troubles anxieux montent en puissance, notamment la crainte de la séparation… Dans de nombreux cas, l’anorexie se déclenche lors d’un voyage scolaire. » Cette maladie reste très difficile à diagnostiquer car, dans un premier temps, les jeunes femmes sont dans une forme olympique. « Elles ont la sensation de contrôler leur corps. Cela confère un sentiment de toute puissance, d’hyper-acuité, d’hyper-vigilance ». Mais très vite, elles tombent dans une spirale infernale, dont il est difficile de sortir seule. « Plus on intervient tôt, plus on a de chance de s’en sortir. »

Bon à savoir, certains signes doivent alerter l’entourage : un amaigrissement important, l’évitement de certains aliments, la disparition des menstruations, une peur panique de grossir. Dans ces cas-là, n’hésitez plus et consultez un médecin.