Avec Blablacar, le grand bazar

Blablacar, plateforme de covoiturage numéro 1 en Europe, absorbe toutes ses «concurrentes locales» sur son passage. En Poitou- Charentes comme ailleurs, la règle du flou artistique s’impose.

Arnault Varanne

Le7.info

Vous vous en souvenez certainement. Aux premiers jours de 2009, la Région avait lancé, avec un soupçon de fierté, le portail covoiturage. poitou-charentes.fr. Un site à partir duquel chaque internaute pouvait trouver son compagnon ou sa compagne de route. A l’époque, c’est la start-up rochelaise Ecolutis qui s’était collée au développement de l’outil de mise en relations. Depuis, le paysage du covoiturage a été chamboulé par l’arrivée en force de Blablacar. Au point que les pionniers du genre se partagent désormais les miettes. Aujourd’hui donc, bien malin celui qui « sait qui fait quoi » derrière les onglets « rechercher vos trajets » et « proposer vos places libres ».

Ce qui est certain, c’est que la colère d’une association normande, développée dans les colonnes de Rue 89, est bien arrivée jusqu’à Poitiers. Eco-Mobile dénonce l’économie collaborative à la sauce Blablacar. « Cette économie collaborative rime aussi avec ultralibéralisme et business agressif… » Et c’est vrai que l’esprit initial de sensibilisation à l’auto-partage a disparu, même si Blablacar -partenaire de la Région, au côté d’Ekodev- se défend de faire payer les trajets locaux de moins de 75km. Des témoignages contraires nous sont parvenus.

Mise en demeure

Au-delà, le flou artistique autour des « zones d’activités qui covoiturent » ne favorise pas l’appropriation par les usagers. Nous avons fait le test. Il est tout simplement impossible de recenser toutes les personnes d’une zone donnée susceptibles de voyager avec vous. Tout le contraire de l’esprit d’origine. « Nous avons mis en demeure le prestataire, filiale de Blablacar, pour obtenir un certain nombre de mises à jour et la restauration de fonctionnalités qui concernent les groupes », commente Jean-François Macaire, président de la Région. Dans l’histoire, ladite Région n’est pas seule en première ligne. Quatre Villes et agglos de Poitou-Charentes ont mis la main au porte-monnaie pour s’offrir le portail de covoiturage. Elles aussi semblent irritées par la tournure des événements. Nous avons tenté de joindre les responsables de la plateforme locale. Hélas, ni Blablacar ni Ekodev n’ont daigné répondre à nos questions sur le succès du service, c’est-à-dire le nombre de covoitureurs poitevins et picto-charentais, ou les bugs remontés par la Région. « C’est un peu difficile de travailler avec eux, soutient le président de Poitou-Charentes. Il y aura sans doute besoin de réglementer ce secteur à l’avenir. Et puis, il faut arriver à trouver une meilleure complémentarité avec les transports publics… » Pour info, la plateforme numéro 1 en Europe pèse dix millions d’usagers en France.

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