Les pompiers voient rouge

La convention signée entre le Service départemental d’incendie et de secours (Sdis 86) et le Samu provoque des remous chez les sapeurs-pompiers. Certains dénoncent une baisse du nombre d’interventions de secours à personnes. L’état-major tente de calmer le jeu, mais les craintes sur la pérennité de l’activité demeurent.

Arnault Varanne

Le7.info

 Le malaise couvait dans les casernes depuis quelques semaines. Il a éclaté, la semaine dernière, à l’occasion de deux réunions à Châtellerault et Poitiers. Les pompiers professionnels ont « le sentiment » que le nombre de « sorties » liées au « secours à personnes » diminue de manière spectaculaire depuis quelques mois. Et c’est un fait, les « Sap » ont chuté de 16%, entre 2013 et 2014. « Comme les incendies (-20%) et les interventions diverses (-26%) », relève le lieutenant-colonel Jérôme Gerbeaux (1). Sauf que les « pros » attribuent la baisse d’activités à la mise en place de la convention entre le Sdis 86 et le Samu. 

 
Le document, que nous nous sommes procurés, pose le cadre de « l’aide médicale urgente dans la Vienne ». Il est entré en vigueur au « premier semestre 2014 », précise Jean-Luc Bertin. Le secrétaire du syndicat CGT des élus du personnel aimerait que ledit cadre soit amendé dans les meilleurs délais. Ses griefs portent sur Logigramme, un guide qui décline les cas d’interventions possibles et fixe le mode de prise en charge pour le médecin régulateur du Samu (15), même si les appels peuvent arriver au 18. A croire le syndicaliste, il y a une « mauvaise prise en compte de certaines situations ». Pour être plus clair, des ambulances privées seraient envoyées là où les pompiers auraient légitimité à intervenir. « La douleur de la victime, l’évolution de son état, le lieu où elle se trouve et le délai d’intervention doivent davantage peser… L’intérêt de la victime doit primer. Nous ne sommes pas dans une démarche corporatiste. »
 
Des voitures repeintes en blanc
 
Derrière ces réflexions, se cache une certaine forme d’inquiétude par rapport aux effectifs… et un brin de concurrence entre privé et public. Ils sont deux cent un professionnels et mille trois cents volontaires dans la Vienne. « On ne va pas crier avant d’avoir mal ! », se défend toutefois le lieutenant Bertin. Qui se veut « constructif et ouvert au dialogue avec le commandement ». De son côté, le lieutenant-colonel Gerbeaux demande du temps à ses troupes. « Nous sommes encore en phase de réglage avec le Samu. Nous nous laissons jusqu’à juin pour affiner les choses. Quant à l’emploi, que les pompiers se posent la question, c’est légitime. Mais nous avons signé une convention l’année dernière, qui garantit les effectifs actuels… » 
 
En attendant, la grogne ne retombe pas. La CGT envisage de réclamer « l’arbitrage de la préfète ». Le SNPP (2), lui, ne s’est pas encore positionné sur le sujet. Deux nouvelles réunions sont prévues dans les jours à venir, à Mirebeau et Vivonne. A la sortie, les pontes du Sdis retrouveront-ils leur véhicule peint en blanc -couleur du Samu-, comme la semaine dernière ? Quand les pompiers voient rouge… 
 
(1) Il assume l’intérim à la direction du Sdis, après le départ du colonel Leprince, au 1er décembre. Son successeur, le Colonel Mérès, prendra ses fonctions le 15 mars. 
(2) Syndicat national des sapeurs-pompiers professionnels.

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