La bonne occasion fait recette

Selon une enquête de TNS Sofres pour l'Ademe (*), 70% des Français affirment avoir déjà acheté des produits d'occasion, contre seulement 59% il y a dix ans. Le marché de la seconde main se démocratise. Exemple à Poitiers, où de nombreux acteurs en profitent.

Florie Doublet

Le7.info

Scène de la vie ordinaire au Secours populaire de Poitiers. Une jeune femme tente de mettre la main sur un chemisier. Plus loin, une grand-mère, accompagnée de sa petite fille, essaie un pull mauve. Ce jour-là, une centaine de personnes a franchi le seuil du magasin. Et c'est comme ça toute la semaine. Ici, les prix ne dépassent jamais 10€. La raison ? Les robes, pantalons et t-shirts ont été déjà portés. En 2012, le chiffre d'affaire de la boutique a augmenté de 40%. C'est un fait, le marché de la seconde main explose. Toutes les enquêtes, dont celle récente de l'Ademe, le prouvent.

La grande majorité des Français se ruent sur l'occasion. Crise oblige, les consommateurs font davantage attention à leur porte-monnaie. « Je ne mets plus un pied dans les grandes enseignes, soupire Carole, croisée dans le rayon manteau du Secours populaire. J'élève seule mes trois enfants et je travaille à mi-temps. Je ne peux donc pas me permettre d'acheter des vêtements neufs. »

Achat solidaire

Comme Carole, 87% des Français avancent des motifs économiques. Mais cette démocratisation de l'occasion ne s'explique pas uniquement par l'effet crise. Solidarité et développement durable  accompagnent le mouvement.
Gérante de « Couleur miel » aux Trois-Cités, Michèle Boutillet estime que 20% de sa clientèle pousse la porte du dépot-vente associatif « par conviction ». « Les gens en ont marre de gaspiller et de jeter l'argent par les fenêtres. »
La société de consommation atteindrait-elle ses limites ? Pour les bénévoles de l'association étudiante Maéva, la réponse est « oui ». En septembre 2012, ils ont ouvert le « bazar solidaire ». Le principe est simple : les étudiants sur le départ offrent électroménager et mobilier à leurs successeurs. Et ainsi de suite…

En clair, rien ne sert de jeter, mieux vaut réutiliser. D'ailleurs, selon le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), 30% des Français déclarent avoir déjà acheté un produit neuf, en envisageant de le revendre ou de le donner à une association. « Le rapport à l'objet a évolué, constate Laurent Guinebretière, responsable de la communauté Emmaüs de Poitiers. C'est particulièrement vrai pour les livres. On s'en sépare une fois qu'ils sont lus, alors qu'il y a vingt ans, on les rangeait dans la bibliothèque. » A tel point que le numéro un national de la récup' croule sous les dons.

Lors de sa dernière braderie, les bouquins se sont vendus comme des petits pains. Tout comme la vaisselle, les vêtements, les jeux et les fournitures scolaires. Emmaüs a comptabilisé 22500 passages. Cadres ou ouvriers, chefs d'entreprise ou bénéficiaires de minimas sociaux… Toutes les classes sociales étaient réunies. Ultime preuve de l'épanouissemement du marché de l'occasion.
 

Une écotaxe sur le mobilier
Depuis le 1er mai, le consommateur s'acquitte d'une « écotaxe » quand il achète du mobilier neuf. Cette somme permet de financer une nouvelle filière de recyclage des tables, chaises et autres meubles. Emmaüs a prioritairement accès aux meubles en bon état, en vue d'une réutilisation. Les autres (re)deviendront des matières premières.

(*) « Les Français et le reemploi des produits usagés » - Août 2012

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