Aussi cruelle qu’inexplicable

Au terme d’un scénario à rebondissements, le PB86 s’est finalement incliné au buzzer face à Paris-Levallois, après avoir compté jusqu’à vingt et un points d’avance. Incroyable !

Arnault Varanne

Le7.info

Les années se suivent et se ressemblent dans les mano a mano picto-parisiens. Paris-Levallois reste la seule équipe de Pro A que le PB86 n’aie jamais battue en huit confrontations. Longtemps, très longtemps, Saint-Eloi a cru que « sa » bête noire tomberait à l’issue de cette soirée par trop pluvieuse. Mais l’équipe de la capitale est passée entre les gouttes d’une quatrième défaite de rang en championnat. A contrario, Poitiers a pris la foudre et, à l’instar d’un boxeur vainqueur aux points (88 contre 83 à l’évaluation), se retrouve littéralement KO debout.

Comment expliquer l’inexplicable ? Comment admettre qu’après avoir compté jusqu’à vingt et un points d’avance (53-32, 24e), Poitiers ait sombré corps et biens dans un quatrième acte cauchemardesque, atone offensivement jusqu’à la 39e minute (de 61 à 44 à 62-67, 39e) ? Le pire, c’est que, même lesté d’un tel boulet offensif, le PB aurait pu, aurait dû s’imposer, à la faveur d’un dernier rush orchestré par le trio Guillard-Dobbins-Nivins. Nanti de trois points d’avance à quinze secondes du terme, les troupes de Ruddy Nelhomme ont craqué sous la pression défensive adverse. Albicy s’est d’abord permis d’égaliser (71-71), avant de chiper le ballon dans les mains du malheureux Tony Dobbins, puis de servir Diot au buzzer (73-71, 40e). Les deux bourreaux du soir vous saluent bien…

La sortie de Grant déterminante

A qui la faute ? A chaud, Tony Dobbins (20pts, 8fpr, 8rbds, 8pds) et son entraîneur se sont attribués la défaite dans un acte de contrition tout à leur honneur. Peut-être le go-to-guy du PB et ses coéquipiers auraient dû faire faute sur un Parisien, avant qu’Albicy ne déclenche à longue distance. Mais au-delà des considérations techniques, un événement a sans doute changé la physionomie du match : la sortie sur blessure du vétéran américain Antonio Grant -il serait touché à la cuisse-, au milieu du troisième quart. Avec un joueur d’expérience supplémentaire dans ses rangs, le PB aurait sans doute mieux résisté à la terrible zone press parisienne, au lieu de perdre la bagatelle de huit ballons dans le money-time !

Ce qui est d’autant plus rageant, c’est que le PB ne peut pas se reprocher grand-chose en ayant mené pendant trente-huit minutes. Nivins a fait du Nivins (17pts, 9rbds, 21 d’évaluation). Smith, Dobbins et Harley ont été énormes à longue distance (8/13 à la pause). Sean May (18pts, 11rbds, 26 d’évaluation) et a fortiori Jawad Williams (9pts à 3/12) ont été plutôt contrôlés. Dommage que l’international Antoine Diot ait retrouvé la mire au plus «mauvais moment». Sans ses deux triplés consécutifs (de 62-50 à 62-56), pas sûr que le « PL » se serait offert le scalp de son hôte dans un final haletant. Mais avec des « si », on mettrait Paris en bouteille. Avec des « si », Poitiers aurait renversé Chalon, Limoges, Boulazac ou encore Nancy… La mini-trêve imposée par la Leaders Cup ne sera pas de trop pour panser les plaies de cette nouvelle déconvenue. Une déconvenue encore plus cruelle et inexplicable que les précédentes.

Photo Seb Jawo

La fiche
A Poitiers, Paris-Levallois bat Poitiers Basket 86 73-71. Mi-temps : 29-44. Score par quart-temps : 23-21, 21-8, 17-15, 10-29. Arbitrage de MM. Chambon, Thépenier et Amrani.
POITIERS
Harley (5), Grant (10), Smith (10), Badiane (2), Nivins (17), Kanté (2), Guillard (5), Dobbins (20). Entraîneur : Ruddy Nelhomme.
PARIS
May (18), Labeyrie (6), Cox (9), Diot (15), Oniangue (3), Aka (2), Williams (9), Albicy (11). Entraîneur : Christophe Denis.

Nelhomme : « C’est de ma faute »

Ruddy Nelhomme (entraîneur du PB86) : « Je cherche mes mots… Sonné ? Disons qu’on perd le match deux fois. On se coupe la main gauche puis la main droite nous-mêmes. Je dirais que c’est de ma faute. On joue un peu comme des jeunes joueurs. On manque de lucidité sur les montées de balle, on panique… Les situations s’enchaînent et on vient gâcher tout le travail qu’on a fait avant. Etant donné que c’est mon équipe et mes joueurs, c’est pour moi. C’est de ma faute. Il faudrait qu’on soit encore plus rigoureux. On les laisse revenir. On ne maîtrise pas assez les situations. C’est incompréhensible la façon dont on joue. Peut-être que des minimes ou des benjamins joueraient mieux que nous. C’est dommage… On est tous sonnés ce soir et on va se faire mal à la tête pendant longtemps. On n’a pas le droit de donner le match à cette équipe de Paris. C’est de ma faute dans l’ensemble du match. »

Tony Dobbins (meneur du PB86) : « C’est de ma faute ce soir. Ce n’est pas possible ce panier à trois points, la balle perdue, la dernière action… C’est vraiment ma faute ! L’équipe a arrêté de jouer correctement après trente deux minutes. Après, Paris a changé de stratégie et nous ne sommes pas adaptés. Nous n’avons pas su être agressifs en attaque. C’est le même scénario qui se répète, à Limoges, contre Chalon… »

Ahmad Nivins (pivot du PB86) : « On a craqué sous la pression. Dans les situations tendues, on perd trop de ballons. Les ballons qu’on perd, c’est la différence entre une défaite et une victoire. C’est principalement mental, mais c’est aussi physique, notamment dans le dernier quart-temps. Ils nous ont rentré dedans et on a reculé, alors qu’on avait travaillé très dur pour prendre ce match. C’est vraiment dommage… J’ai les boules pour les supporters. »

Andrew Albicy (meneur de Paris-Levallois) : « On est dans une période où on n’est pas bien au niveau de la confiance. On prend quarante six points à la mi-temps, ce n’est pas normal, même si je respecte cette équipe de Poitiers. En deuxième mi-temps, la zone press a bien fonctionné, comme à Dijon par exemple. On a su exploiter les ballons perdus. Maintenant, il y a plein de choses à corriger pour être pour les play-offs. »

Christophe Denis (entraîneur de Paris-Levallois) : « A la mi-temps, j’ai dit à mes joueurs qu’il fallait arrêter d’accepter le ridicule, que ça suffisait. Il fallait que les gars arrêtent de se chercher des excuses pour sauver leur place individuellement. (…) On a un certain potentiel, mais on a tendance à penser qu’il va nous sortir de certaines situations. Les joueurs arrivent à se persuader que, quand ils voudront mettre le coup d’accélérateur, ça passera. Mais ce n’est pas un état d’esprit qui me convient, surtout quand on prétend gagner des choses. C’est le comportement d’enfants gâtés ! Je suis très fier et respectueux de ce qu’ils ont fait en deuxième mi-temps. Mais, même si on sort vainqueurs ce soir, nous avons des problèmes. »

 

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