Violences sexistes et sexuelles : « La parole ne s’est pas libérée »

Chargée du pôle recherche au CIF-SP et docteure en sociologie, Sachiko Fujimaki vient de mener une étude sur les violences sexistes et sexuelles chez les femmes de plus de 
60 ans. Une problématique largement sous-estimée.

Arnault Varanne

Le7.info

Pourquoi avez-vous choisi de vous intéresser au cas des violences commises sur les femmes de plus de 60 ans ?
« Elles constituent une population souvent négligée lorsqu’il s’agit de reconnaître les victimes de violences liées au genre. A partir de l’âge de la retraite, le contexte familial et conjugal change. Cela peut être déclencheur de violences. La perte d’autonomie est un autre facteur à prendre en compte. Les femmes sont moins en capacité de se protéger de leur entourage, d’aidants, de professionnels... »

Les violences sont-elles de la même nature ?
« On n’imagine pas le viol ou l’homicide après 
60 ans, et pourtant cela existe. En 2022, les registres de la police et de la justice ont montré que les femmes de plus de 60 ans représentaient 28% des victimes d’homicides au sein d’un couple. Après, les formes de violences évoluent au fur et à mesure que les couples vieillissent. Il y a peut-être moins de violences physiques que chez les jeunes, elles sont davantage verbales, pouvant être commises par le conjoint, le fils en manque d’argent... »


Combien de témoignages vous sont-ils parvenus et que traduisent-ils ?
« L’enquête a permis de collecter une cinquantaine de témoignages de quelques victimes, mais surtout de professionnels qui dénoncent des violences conjugales, pas de viols ou d’agressions sexuelles. La parole ne s’est pas libérée comme dans d’autres tranches de la population. Beaucoup de femmes considèrent que ces rapports sont normaux. Elles ne se voient pas porter plainte contre leur famille ou dégager leur fils qui n’a pas de travail. Déménager est compliqué aussi. Je dois rendre un rapport complet le 8 mars. »

Votre travail de recherche doit-il aboutir à un plan d’action ?
« Il y a un manque d’informations et de prise de conscience de ces violences. Le CIF-SP est en train de monter un projet avec le Cidff (Centre d’information sur les droits des femmes et des familles). Notre idée est de mettre en place des ateliers de sensibilisation destinés aux professionnels et d’assurer une meilleure prise en charge des victimes. Nous recherchons des financements. En parallèle, nous poursuivons le recueil de témoignages de victimes. La prochaine étape sera de s’intéresser à ce qui se passe dans les Ehpad. »


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 - 05 49 37 07 78 - 
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