Le télétravail dans le temps

Confidentiel avant la crise Covid, le télétravail est devenu un incontournable dans l’organisation des entreprises.

Claire Brugier

Le7.info

Il n’est plus possible de faire comme s’il n’existait pas. Le télétravail fait désormais partie du paysage. Mieux encore, « il a permis de recommencer à penser l’organisation du travail », assène Ewan Oiry, professeur et membre du Centre de recherche en gestion (Cerege), à Poitiers. Dans la réflexion engagée, des mots-clefs reviennent.


Confiance et management

Loin des yeux, loin du travail ? Sauf exceptions, la réponse est plutôt « non ». « L’enjeu est le même que pour quelqu’un au bureau, assure Maud Salzert, la responsable des ressources humaines de Duo Solutions, cabinet d’expertise-comptable. Mais dans le télétravail, la confiance est aussi de donner « les moyens de », dans la structuration des tâches notamment. » La question de la confiance est donc indissociable de la manière dont le manager accompagne ses salariés. « Le télétravail est souvent une loupe qui met en avant les carences dans l’accompagnement des collaborateurs. » 


Outils et espaces

« Le télétravail implique de repenser les outils de communication (mails, Teams…) car le seul moyen de contact devient l’outil informatique, constate Damien de Carvalho, docteur en sciences de gestion au Cerege. L’espace de travail physique doit aussi être repensé pour mettre du sens dans les lieux dédiés aux tâches non télétravaillables. » En somme, il ne s’agit pas juste de les délocaliser. « Avec le télétravail, on déstabilise le travail réel, notre rapport à la technologie change, aux autres aussi. Ce n’est plus le même travail, assène Ewan Oiry du Cerege. On a invisibilisé la performance de l’équipe, qui se faisait dans la coordination en présentiel. »


Télétravaillable ou pas

Tous les postes ne sont pas télétravaillables. C’est pourquoi « il faut avoir un regard attentif sur les salariés qui ne peuvent pas télétravailler, convient Thomas Girard, directeur des ressources humaines de Grand Poitiers. Cela passe par les EPI (ndlr, équipements de protection individuelle), un plan d’accompagnement managérial… » La question se pose différemment chez Duo Solutions. « Nos métiers sont télétravaillables à plus de 90%, donc nous ne sommes pas confrontés à la problématique de différenciation entre les travailleurs, souligne Maud Salzert. Mais il nous faut nous organiser pour que les salariés soient suffisamment autonomes. »


L’intérêt pour l’employeur

« Le télétravail a permis de renforcer la robustesse et l’agilité de la collectivité en cas de crise, remarque Thomas Girard. Nous avons 35 000 agents, dont 600 ont une autorisation pour deux jours maximum par semaine. Le principal apport se situe dans la continuité du service public. Il va falloir ajuster le cadre mais le télétravail a vocation à perdurer. »


L’intérêt pour le salarié

Les recherches ont mis en avant « l’amélioration de l’articulation entre vies professionnelle et personnelle, mais aussi un meilleur suivi de la santé, résume Damien de Carvalho. Télétravailler permettrait d’assurer plus facilement des rendez-vous médicaux. » 


L’attractivité

C’est une réalité : le télétravail s’invite désormais dans les entretiens. « En matière de recrutement, c’est la première question qui nous est posée. Le télétravail est un critère incontournable d’attractivité »,
note Maud Salzert. Privé ou public, même constat. « Cela a aussi réglé le problème d’attractivité de nos métiers », confirme Thomas Girard. 


Source : conférence Regards croisés organisée le 12 décembre 
à l’IAE de Poitiers.


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