Léo Bernard : « Tout le monde recherche du sens aujourd’hui »

Spécialiste des ressources humaines, Léo Bernard co-signe avec Elise Moron Permis de recruter, un ouvrage très pratique en vingt-trois étapes pour permettre aux managers d’attirer les meilleurs candidats. Le Poitevin donne les clés aux dirigeants.

Arnault Varanne

Le7.info

Comment expliquez-vous que le recrutement soit toujours la préoccupation n°1 des entreprises, tous secteurs confondus ?
« Beaucoup de gens n’ont pas encore compris que le monde du recrutement a changé. Depuis le Covid, les candidats demandent la même chose, ce n’est pas une question de génération ou d’époque. Qu’on ait 20, 40 ou 60 ans, les gens veulent être bien payés, respectés, avoir un peu de télétravail quand c’est possible, évoluer dans une boîte qui a des valeurs et du sens. En anglais, on appelle cela l‘employee value proposition. Tous les managers galèrent pour recruter, ils ne savent pas forcément comment évaluer les candidatures, poster des messages d’approche pertinents sur les réseaux... »

Justement, votre livre Permis de recruter vise à leur donner les bonnes pratiques. Quelles sont-elles ?
« D’abord, il ne faut pas penser que les candidats vont venir vers l’entreprise comme ça, spontanément. Cela impose de faire un vrai travail d’introspection, de savoir ce qu’on va exactement proposer à ses futurs salariés... Les candidats deviennent de plus en plus exigeants parce qu’ils ont la connaissance. Une bonne annonce de recrutement, aujourd’hui, nécessite d’indiquer clairement combien le salarié va gagner, où il va travailler, avec qui... Les valeurs et la culture, on s’en fiche un peu sur une annonce ! »

Quand le rapport de force entre salariés et employeurs s’est-il amorcé ?
« La première bascule a eu lieu avec la généralisation du smartphone. A ce moment-là, les salariés ont compris avec les réseaux comme Linkedin ou Glassdoor qu’ils avaient le choix et pouvaient checker la réputation des employeurs avant de postuler. La deuxième bascule s’est déroulée au moment du Covid, où les salariés ont eu le temps de réfléchir à ce qu’ils voulaient vraiment. Enfin, tout le monde recherche du sens aujourd’hui et n’a plus peur de changer d’entreprise, alors qu’avant on était dans le mythe du boulot à vie. On ne s’autorisait pas. »

« On était dans le mythe du boulot à vie. »

Demain, l’intelligence artificielle (IA) va-t-elle révolutionner le recrutement et laisser moins de place aux relations humaines ?
« Aujourd’hui, trois quarts des candidats disent ne pas vouloir être évalués par l’IA dans un processus de recrutement. De mon point de vue, le premier contact doit forcément se faire avec un humain. Après, dans les tests techniques ou les cas pratiques, l’IA peut intervenir. Comme dans l’évaluation de certaines tâches, notamment sur les annonces en fonction de critères préalablement définis. Mais si l’IA peut aider, assister, elle ne doit jamais être autonome et prendre les décisions à notre place. »

Vous animez un podcast qui s’appelle Tam-Tam. L’un de vos invités récents vous a-t-il marqué pour une idée, une bonne pratique ?
« Très bonne question ! Je dirais Chantal Lasnier, recruteuse pour le Comité d’organisation des Jeux olympiques de Paris. Elle a dit quelque chose qui m’a marqué. Sur les enjeux d’inclusion et de diversité, toutes les boîtes disent qu’elles s’engagent mais ne le font pas forcément. Son conseil, c’est de montrer par des photos, des vidéos, des témoignages, la réalité de la situation. Ça fonctionne car les candidats peuvent s’identifier derrière. »

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