La Journée mondiale des enseignants se déroule jeudi. Si le métier reste attractif, beaucoup de professeurs s’interrogent sur la suite à donner à leur carrière voire quittent l’Éducation nationale, dans des proportions assez faibles toutefois.
Les masters MEEF (Métiers de l’éducation, de l’enseignement et de la formation) continuent de faire le plein chaque année. A l’université de Poitiers, un nouveau parcours de Préparation au professorat des écoles a vu le jour l’année dernière, accolé à la licence sciences du langage. Plafonné à 35 places, il est complet dès sa création. Désormais en deuxième année de licence, cette première promotion témoigne d’une motivation sans failles ou presque. « On voit comment ça se passe pendant nos stages, relate Maxie. Ce n’est pas tout rose mais c’est passionnant, me concernant je sais que je veux faire ce métier depuis toute petite. » Une autre embraye : « On sait que le salaire est peu élevé mais je pense que ce qui nous porte, c’est la transmission d’un savoir. Avoir les enfants toute la journée et les voir évoluer, c’est différent du secondaire où on fait notre matière puis on passe à une autre classe. » Une vocation donc, mais aussi un métier qui attire pour sa polyvalence.
« Ne pas finir aigrie »
« J’hésitais entre l’enseignement et la psychologie, mais en étant professeure des écoles, on a un peu tous les rôles, on touche à toutes les matières », poursuit Lou. Sa camarade, plus nuancée mais déterminée à passer le concours, raconte comment sa cousine enseignante a été
« dégoûtée » rapidement. « Son travail était décrédibilisé, elle entendait toujours qu’elle avait un métier facile. » Enseigner, un job facile ? L’argument fait tiquer Françoise, en disponibilité depuis 2016. La professeure d’anglais a quitté les salles de cours par lassitude. « Le système éducatif me pesait de plus en plus. On va de réforme en réforme avec une déconnexion des élus du terrain. On a des gamins en grande souffrance, avec en face de moins en moins de psychologues, d’infirmières... » Et pourtant, Françoise a pendant très longtemps hésité à sauter le pas de la reconversion. « Mais je ne voulais pas finir aigrie... », avance celle qui transmet d’une autre manière aujourd’hui.
Pas de grande démission
Des enseignants un brin désabusés, le Snuipp-FSU en voit très régulièrement dans ses permanences. Son stage dédié à l’évolution de carrière, en novembre, compte près de
30 inscrits. « Beaucoup de collègues s’interrogent sur leur avenir »,
confirme Apolline Letowski, co-secrétaire du SNUipp-FSU 86. Et combien s’affranchissent de l’Education nationale ? Sur l’ensemble de l’année dernière, le rectorat évoque 38 démissions et 64 ruptures conventionnelles sur l’académie. « Sur 18 600 professeurs titulaires ou contractuels, c’est l’épaisseur du trait », note Jean-Jacques Vial, secrétaire général. Au-delà des départs « secs »,
356 professeurs ont sollicité en 2021-2022 leur hiérarchie « pour voir ce qu’elles pourraient faire en termes d’évolution de carrière ».
Détachement, disponibilité, reconversion, congé formation... Il y a une vie après la classe. Signe positif, dans l’académie de Poitiers, « on a un potentiel de trois à quatre candidats par poste de professeur des écoles ». En résumé, s’il n’y a pas de grande démission, il n’y a pas davantage d’engouement massif pour le métier. La Journée mondiale des enseignants jeudi ne devrait pas changer la donne.