mardi 24 décembre
Depuis près de dix ans, Jean-Jacques Sallaberry dirige bénévolement l’entreprise Stade poitevin volley-ball. Infatigable, obstiné et respectueux des hommes.
On l’imagine timide. Il se dit discret. “Je ne suis pas un homme de paillettes”, avoue-t-il simplement. Dans la confession comme sur son siège de torture, les soirs de match, Jean-Jacques Sallaberry noie son regard dans l’horizon de ses pensées. Aujourd’hui est pourtant un autre jour. Les angoisses sportives sont refoulées, les frustrations évacuées. L’homme se livre sans concession. Apaisé à défaut d’être serein. Depuis juin 2000 et sa nomination à la présidence du Stade Poitevin Volley-Ball, l’informaticien bordelais, “monté” à Poitiers au début des années 80, tangue sous la bourrasque. Les cicatrices de sa prise de fonction, voulue par Jacques Santrot lui-même, ont peiné à se cautériser. “A l’époque, il n’y avait pas foule pour reprendre le flambeau, rappellet- il. Le club et la Ville étaient en bisbille. Le maire m’a dit qu’il ne fallait pas s‘inquiéter, qu’il serait derrière moi. C’est vrai, il le fut. Mais rien n’a été facile. Il m’a fallu apprendre le système et quatre ans pour éponger, avec mon bureau, les dettes qui couraient.”
“Je ne demande rien d’autre que le respect”
Le bonhomme a tenu bon. Mais l’histoire se plaît à resservir les plats. Aujourd’hui, c’est un nouveau déficit, de 97 000 € celui-là, qui hante ses nuits. Verra-t-il un jour le bout du tunnel ? “En 2006, on avait eu affaire à un trou de 44 000 €. On s‘en est sortis. Là encore, on y arrivera. Sans doute faudra t-il consentir de gros efforts sur la masse salariale les quatre prochaines années et faire de petites économies là où on le pourra. Mais je crois fondamentalement dans les valeurs humaines. Je compte sur elles pour que le club brave encore cette tempête.”
Ah, les valeurs humaines. Plus qu’une philosophie, un moteur de vie. Jean-Jacques Sallaberry a beau se dire “piètre communicant”, c’est en allant sans cesse vers l’autre qu’il façonne sa richesse. Et en donnant souvent plus qu’il n’en demande. “J’aime aider. J’aime savoir ce qui ne va pas chez l’autre. Je ne pourrais pas vivre seul au milieu du désert. Moi, ma raison d‘avancer, c’est l’humain. Dans le milieu du sport professionnel, nombreux sont ceux qui n’hésitent pas à écraser pour arriver à leurs fins. Je ne saurais m’y résoudre.”
Certains le disent trop gentil. D’autres, parmi ses plus fidèles lieutenants, lui reprochent de manquer de caractère et de poigne. Lui n’en démord pas. C’est dans le travail de l’ombre et l’obstination, le consensus et l’humilité que son salut réside. “On peut peut-être me juger idéaliste, mais je ne changerai pas. Je me donne à 200% dans ce que je fais, sans rien demander d’autre en retour que le respect.” Sallaberry le bénévole gère de la même façon les destinées des dix-sept salariés du Stade Poitevin que celles des huit employés de son entreprise, Micro Tech Informatique. “A cette seule différence près que mes huit collaborateurs seront toujours là l’an prochain. Au club, ça bougera encore. La gestion des hommes n’en est à chaque fois que plus difficile.”
“Avoir de grandes idées est donné à tout le monde…
Un espoir traverse soudain son esprit. Celui de voir un jour le Stade devenir le premier club de volley français à franchir le Rubicon de l’hyper-professionnalisation. “Quand je vois les Italiens de Modène avec trois chargés de communication, ça m’interpelle. Et tous ces grands clubs qui ont des directeurs financiers à gogo. Moi, je n’en demande qu’un seul. Pour que notre sport soit véritablement structuré et compétitif, c’est une étape indispensable à franchir.” Sans argent, est-ce possible ?
“On en revient toujours à la même chose. Aujourd’hui, non, ce n’est pas viable. Hélas. Peut-être ne le sera-ce jamais. Je ne berce pas d’illusions. Avoir de grandes idées est donné à tout le monde, mais les mettre en place et les pérenniser, c’est l’affaire d’une minorité.” Le président se nourrit encore d’ambitions. La plus prégnante est d’offrir à Poitiers ce titre qui tarde à enrichir sa vitrine. L’homme, lui, reste fidèle à sa ligne de conduite. Celle d‘un gars simple, mari et père aimant, passionné de sport, de musique classique et de bricolage, amoureux de belles mécaniques et de bons vins, petit dormeur et gros travailleur, qui ne cherche rien d’autre que de pouvoir continuer à se regarder dans la glace “sans avoir à me dire que j’ai failli à mes principes”.
On imaginait Jean-Jacques Sallaberry timide. On le découvre déterminé et droit, simple et altruiste. Un homme parmi les hommes.
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