La vie folle de Désirée

À l’occasion de la sortie du film “La Vida Loca”, Désirée Mazier, étudiante à Poitiers, évoque la situation de son pays, le Salvador.

Romain Mudrak

Le7.info

Jeudi 1er octobre, 23h. La projection de La Vida Loca se termine au Mega CGR de Buxerolles. Après un film si haletant retraçant le quotidien du gang de la 18 au coeur du Salvador meurtri, le débat se lance. Les spectateurs encore nombreux s’adressent à Carole Solive et Yves Jeanneau, producteurs du film. Le réalisateur franco-espagnol Christian Poveda manque à l’appel, il a été assassiné quelques jours plus tôt. Soudain, un petit bout de femme lève la main dans la salle, prend la parole et raconte son histoire…

Merci à vous de porter un intérêt à mon pays, si petit et si loin de la France.” Les premiers mots de Désirée Mazier sont dédiés au public. Tant de gens, de la communauté internationale au propre gouvernement salvadorien, ont ignoré, voire méprisé, les difficultés de son peuple qu’elle s’étonne de trouver un si bel écho à Poitiers. Cette jolie jeune femme de 33 ans est arrivée ici en septembre 2007 dans le cadre d’un programme Erasmus Mundus. Terminée la crainte d’être dépouillée, agressée ou pire. Bienvenue dans une ville “enchantée” où les gens peuvent se reposer, contrairement à chez elle. Désirée reconnaît une partie de son Salvafdor natal.

Non, Désirée n’a pas vécu la folie des gangs dans ce pays connu pour être l’un des plus dangereux du monde où seuls 10% des homicides sont élucidés. Mais comme tous ses compatriotes, elle a grandi dans une société empreinte de la pire des violences, celle du désespoir. “On ne peut parler des Maras sans connaître le contexte historique. Les jeunes ne luttent pas simplement pour contrôler le trafic de drogues, explique Désirée. A la fin de la guerre civile en 1992, le gouvernement n’a proposé aucune solution pour réinsérer les combattants. Depuis, la société est profondément destructurée. Il faut comprendre qu’un jeune isolé, battu par ses parents, qui ne mange pas à sa faim et qui ne connaît pas l’école, entre dans un gang qui lui ressemble. Je n’accepte pas mais je crois comprendre.”

De son côté, Désirée est allée à l’université. Celle des Jésuites bien qu’elle ne soit pas pratiquante. En 1995, elle opte pour la communication. Quelques années plus tard, ses yeux grand ouverts sur le monde, elle entre au Fespad, une ONG choisie par les Nations Unies pour coordonner les actions locales en faveur des réfugiés. Là encore, elle est confrontée à des situations boulevers antes. “Comment expliquer à des familles colombiennes ou du  Bangladesh qu’elles ne rejoindront pas les Etats-Unis. Certains étaient même considérés comme des terroristes.” L’émotion est trop forte. Au bout de deux ans, elle remplit un dossier afin de participer au programme Erasmus Mundus.

Vu d’ici, Désirée est comme un phare au milieu de l’océan déchaîné. Attachante et joyeuse, elle se dit prête à participer à toutes les initiatives qui pourraient améliorer le sort des Salvadoriens. Mais pas en politique. Plutôt marquée à gauche, malgré l’influence de ses parents, elle ne croit plus en l’action publique, mise à mal par la stratégie, parfois injuste, de “la main dure” de l’ancien gouvernement de droite. Poveda a mis en lumière l’échec de cette politique. Certains pensent que cette position l’a tué.
 

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