La discipline à visage humain

André Uzé vient d’effectuer sa dernière rentrée au lycée des Feuillants, avant la fermeture définitive de l’établissement en juin 2010(*). Rencontre avec un homme pétri d’humanisme qui s’apprête à remiser sa casquette d’ancien “préfet de discipline”.

Christophe Mineau

Le7.info

Les appellations sont parfois trompeuses . Quand André Uzé commence sa carrière au Lycée des Feuillants en septembre 1974, il est recruté par les pères jésuites de St-Jo pour devenir le “préfet de discipline” des classes de seconde. L’esprit de Mai 68 n’a pas encore envoyé aux oubliettes ce terme un brin “réac” qui rappelle plus les heures de gloire du ministre de l’Intérieur Raymond Marcelin que celle de “Dany le Rouge”. Les années passent et, sous couvert de modernité, le préfet de discipline devient responsable de niveau, puis responsable de secteur… Mais André Uzé lui, ne change pas.
Le temps n’a jamais altéré son sens aigu? de l’humanisme. Jamais, cette valeur chevillée au corps n’a été négociable. “Un vieil héritage de mon passage au centre d’observation de la Rivardière où j’encadrais des ados en situation de pré-délinquance. Un boulot passionnant qui a forgé mon tempérament. Une vraie étape fondatrice de ma personnalité”, confesse t-il.

Une autorité sans autoritarisme

Malgré la dureté des rapports avec une jeunesse parfois rebelle ou désorientée, André Uzé est de ces anciens “surgé” qui ne confondent jamais autorité et autoritarisme.
Dans mon métier, j’ai toujours aimé le contact avec les ados. J’ai toujours puisé ma force dans la richesse de la relation que j’ai nouée avec eux. Le conflit existait, mais je pense avoir toujours tout fait pour le dépasser et en sortir par le haut.” Ses armes ? Le dialogue. “Sans jamais être inquisiteur, ouintrusif”. L’écoute, le respect et le sens de la justice aussi. Et une obsession. “Tirer la bonne ficelle pour renouer le fil et repartir sur des bases constructives.”

Jamais résigné

Parfois, André Uzé a douté. Jamais il ne s’est résigné. “En 35 ans de métier, j’ai pu m’interroger ou me retrouver dans une impasse. Mais je pense avoir toujours tout mis en œuvre pour avancer en m’appuyant sur des collègues, leurs expériences ou leurs conseils, mais aussi sur l’ambiance qui régnait au sein de l’établissement”, concède-t-il, au crépuscule de sa carrière. “Avec les jeunes, on n’a pas le droit d’abdiquer. Il faut tout essayer, encore et toujours pour aller de l’avant.” Endossant, tour à tour, les habits de pompier, d’horloger ou de diplomate, André Uzé à remis mille fois le métier sur l’ouvrage. Un éternel recommencement au service d’une jeunesse qu’il aime fondamentalement, mais qu’il a parfois dû bousculer, même rudoyer, sans jamais la casser. “Un ado, c’est fragile. J’ai pu m’expliquer franchement. J’ai parfois dû accepter un vocabulaire ou un comportement inadaptés pour rétablir un climat plus serein et constructif.” En juin prochain, l’ancien “préfet de discipline” quittera l’enseignement et le Lycée Isaac de l’Etoile Les Feuillants. Il tournera définitivement le dos à la grande bâtisse du boulevard Chasseigne, mais jamais à cette jeunesse qui a donné sens à sa vie.
 

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