
Hier
La remontada poitevine
Très mal embarqué au début du quatrième quart-temps, le PB86 a retourné la situation face à Vichy (78-76) grâce à un Luka Rupnik de gala. A confirmer vendredi face à Denain.
« Merdre ! » Premier mot de Père Ubu jeté à la figure de Mère Ubu. En intercalant le R, il ajoute de la rage à la pestilence. Ça schlingue dans la famille. Dans tous les sens du terme. Un être puant, littéralement, il ne se lave jamais (Mère Ubu confirme). Vulgaire, colérique, narcissique, factieux, criard, sans morale et sans vergogne mais populaire. Cet ignoble individu prend le pouvoir en tuant le roi. C’est un couard donc il fait exécuter ses basses œuvres par ses palotins et salopins. Puis il achète la foule en organisant un jeu des millions du trésor spolié, et il invite tout le monde à manger au palais. « Vive le Père Ubu ! » Brèves réjouissances, car Ubu jouit du pouvoir absolu avec une férocité sublimée par une bêtise suprême, incommensurable. Son Moi enfle autant que sa bedaine. Affreux, sale et menteur, régi par ses pulsions, Ubu couvre ses invités de « merdre » quand il ne les fait pas trucider, ne tient jamais parole, sacrifie ses affidés.
« Je veux m’enrichir », vocifère-t-il. Comment ? D’abord faire le vide : il passe à la trappe tous les nobles, puis les magistrats et enfin tous les gens de la « phynance ». Son pouvoir est si grand qu’il dit avoir imaginé un « petit système pour faire venir le beau temps et conjurer la pluie » et, surtout, il dispose de la machine à décerveler. Trop, c’est trop ! Son trône vacille, alors il part en guerre. Ubu est roi de Pologne, mais c’est pure contingence, ce pourrait être Nulle Part et Partout, c’est pourquoi il traverse l’Ukraine pour affronter les Russes. Rappelons que ce personnage a été inventé à la fin du XIXe siècle par Alfred Jarry. « Vous serez libres de voir en M. Ubu les multiples allusions que vous voudrez, ou un simple fantoche », prévient l’auteur.
Comme Don Quichotte ou Dracula, c’est un type universel dont le sens est rechargé à toutes les époques. Pour preuve l’adjectif « ubuesque » quand l’outrance confine à l’absurde. Ce tyran burlesque n’a pas la gravité shakespearienne mais plutôt la truculence rabelaisienne du querelleur Picrochole.
La pièce de Jarry fit scandale. Ubu Roi est devenu un classique. Cette manière de faire table rase fournit les armes d’une critique virulente qui a inspiré nombre d’artistes aux antipodes. Par exemple, Ubu de Franciszka Themerson, le rock industriel post-punk de Pere Ubu, ou UbuWeb, site historique des avant-gardes sonores et visuelles où l’on a déniché une pépite : Ubu Roi adapté pour la télévision en 1965 par Jean-Christophe Averty : « Le Père Ubu est un gros ver blanc qui s’agite sur un fond noir. »
CV express
Journaliste tout-terrain, d’une insatiable curiosité. J’orchestre L’Actualité Nouvelle-Aquitaine, revue culturelle à fort contenu scientifique éditée par l’Espace Mendès France, ancrée dans la pensée d’Edgar Morin : « Relier la science et les cioyens. »
J’aime: flâner dans les villes, marcher sur la plage les pieds dans l’eau, les lectures d’Alberto Manguel, les saveurs de Denis Montebello et de Glen Baxter, les sons de Pierre Henry, Vanessa Wagner, Zaho de Sagazan, le fié gris, le mothais sur feuille.
J’aime pas : les pessimistes chroniques, les lamentations du lundi, les extrêmes, les savantes péroraisons.
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