Avec Lucile Parnaudeau, le compte est bon

Lucile Parnaudeau. 35 ans. Directrice administrative et financière de l’association Audacia, à Poitiers. Elue d’opposition. A cheval sur la séparation entre public et privé. Soucieuse du bon usage des deniers du contribuable. Signes particuliers : sans filtre et « très bosseuse ».

Arnault Varanne

Le7.info

« Pourquoi moi ? » L’entretien commence par une question. Il se terminera une heure et vingt-deux minutes plus tard par une somme de réponses. Eh oui, après tout, que vient faire la directrice administrative et financière (Daf) de l’association Audacia dans la galerie de portraits du 7 ? Elle qui adore parler « du lien entre argent public et privé, de fiscalité et de délégation de service public » reconnaît que son « dada » n’est « pas très glamour ». « Mais j’adore ça ! », glisse Lucile Parnaudeau dans un sourire. Les plus fins connaisseurs de la vie politique poitevine l’ont découverte en 2020 sur la liste d’Alain Claeys, en position éligible. Le maire de Poitiers battu par Léonore Moncond’huy, la Toulousaine de naissance joue sa partition dans l’opposition.

« Une vraie chance »

« J’ai voulu mettre sur la table la question des horaires des commissions et conseils. Mais ça a fait flop. Avec certains élus, dans la rue, j’ai pu en discuter mais sans plus... » Alors la jeune maman d’une petite fille n’a pas insisté et vit sa première expérience politique d’un peu plus loin. Elle ne sait au passage « absolument pas » 
de quoi son avenir d’élue sera fait, mais appelle déjà à « plus d’ouverture et de concertation ». 
Qu’à cela ne tienne, la trentenaire a « beaucoup à faire » par ailleurs, chez Audacia, qui a traversé il y a peu une zone de turbulences financières liée au redéploiement de ses missions. L’association, qui vient en aide aux plus vulnérables, comme les réfugiés ukrainiens, compte 
292 équivalents temps plein. Elle pilote pour sa part une équipe d’une quinzaine de collaborateurs. Une mission qu’elle perçoit 
« comme une vraie chance, pas comme un métier ». « C’est de la finance avec des tableaux Excel et des logiciels de compta ! 
Mais c’est aussi et surtout être au contact de personnes dans le besoin. Les rares fois où je croise les bénéficiaires, cela me motive pour des semaines. Mon métier a du sens. »


Au milieu des « Audacieux et Audacieuses » -c’est son terme-, Lucile rayonne. Elle a même repris le fil de ses publications inspirantes sur Linkedin, un temps interrompu par la crainte du mélange des genres entre engagements politique et professionnel. Elle y évoque des sujets sérieux avec une bonne dose de dérision ou de mise en scène. La fille d’ingénieur et d’autrice et professeure de théâtre a grandi « dans un milieu riche intellectuellement ».

Cependant, elle considère avoir été élevée « d’une manière à ce qu’[elle] travaille beaucoup aujourd’hui ». « Mes deux parents sont indépendants, ceci explique sans doute cela. » Gamine, elle rêvait de « travailler dans le blanchiment d’argent et la haute criminalité financière ». 
Jusqu’à se rendre compte que c’était « hyper dangereux » ! Le journalisme d’investigation ? 
« Ça m’aurait plu aussi. » Bac bilingue en poche, la Poitevine d’adoption -depuis 2014- a filé vers l’Institut libre d'étude des relations internationales, à Paris. Elle y a découvert la géopolitique et le japonais, avec la diplomatie comme horizon. Avant de poursuivre sur un master en commerce international à l’université Saint-Andrews, en Ecosse.

« Besoin de 
reconnaissance »

« Là-bas, on parlait marketing, titrisation sur les marchés boursiers... J’y ai appris plein de choses et, surtout, j’ai rencontré des personnes qui sont toujours mes amis. » Un détour par le cabinet Deloitte, à Nantes puis à Rennes, lui a permis de « compléter 
[s]a formation ». Le contrôle de gestion, plus qu’un métier, une vocation pour celle qui assume son « besoin de reconnaissance ». Et aussi l’étanchéité entre vies personnelle, professionnelle et politique. Elle y tient comme à la prunelle de ses yeux. Question d’éthique. Lucile Parnaudeau se plaît dans cette ville « stimulante et engagée », « pas trop petite », mais dont elle aimerait que « le cadre de vie » soit plus agréable. Quand l’élue rejoint la citoyenne, à moins que ce ne soit l’inverse. La citoyenne, elle, court, après le temps mais pas seulement. Elle a d’ailleurs fait son premier semi-marathon (Poitiers-Futuroscope) sur un malentendu.

« Je pensais faire 10km mais c’était pour l’association Unis pour Tiphaine et je n’avais le choix qu’entre le semi et le marathon... Je ne pouvais pas reculer ! » Lucile Parnaudeau assume de... courir plusieurs lièvres à la fois en quête de reconnaissance. « Je suis géniale, je n’arrête pas de le dire ! », plaisante-t-elle presque théâtrale. « Pas perfectionniste », la maman-Daf-élue-entrepreneuse s’est aussi posé plus jeune la question d’embrasser une carrière artistique. Dans un monde où « tout le monde joue un rôle social », elle a finalement opté pour la gestion, plus austère et moins lumineuse. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir des opinions tranchées, des convictions. Sur le féminisme notamment. 
« Je suis honorée que vous soyez venu me voir non pas parce que je suis une femme mais parce que je fais des choses ! » Pourquoi elle ? La question ne tient plus.

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