mardi 24 décembre
Le Regard de la semaine est signé Julie Jadeau.
Fascination, fantasme, ignorance et peurs sont les leviers de la psychophobie ordinaire. Les fausses idées, fondées sur la méconnaissance des problèmes, plongent les personnes concernées dans la souffrance, la honte et la lutte permanente. Les non-dits, l’invisibilisation, sur fond de médiatisation uniquement centrée sur le côté dramatique et déviant, sont vécus comme une double peine par les malades.
La stigmatisation se manifeste par des pratiques diffuses, ancrées dans la société et le fonctionnement des institutions. Les personnes concernées par des troubles psychiques sont en première ligne face aux pratiques discriminatoires. L’impact négatif des médias et les représentations délétères au sein même des familles ou de groupes sociaux sont « installés ».
86% des 15-25 ans ne seraient pas prêts à être en couple avec une personne atteinte d’une maladie mentale. En 2014, le Haut Conseil de la santé publique affichait déjà comme priorité la lutte contre la stigmatisation des maladies mentales et de la psychiatrie. Les conséquences de cette psychophobie sont directes et massives : les mécanismes d’autostigmatisation communs dans les maladies psychiques freinent considérablement l’accès aux soins mais aussi leur efficience. Ces préjugés ou stéréotypes peuvent nous mener à maltraiter des gens qui ne méritent pas d’être jugés négativement.
La maladie psychique fait partie de l’expérience au quotidien de la personne, mais ne définit pas qui elle est. En France, une personne sur quatre est touchée par un ou des troubles psychiques, une proportion qui a nettement augmenté ces dix dernières années. Gardez en mémoire que ces personnes, y compris touchées par les troubles les plus sévères, sont largement plus souvent victimes que responsables de violences. Et pourtant, il est déconcertant de voir à quel point notre société se nourrit des facteurs qui aggravent notre santé mentale.
Comment faire bouger cet iceberg ? Oui, davantage de témoignages émergent sur les réseaux, quelques actions de sensibilisation trop confidentielles sont organisées... Mais la norme érige toujours cette muraille entre eux et nous, entre vous et nous. Depuis toujours, c’est le grand silence parce que c'est honteux, la psychiatrie effraie... Nous nous trompons de cible. « Les fous » sont considérés comme un bug dans le système qu'il faudrait reformater, faire rentrer dans la cité mais seulement s’ils sont
« stables » ! Alors que toutes les personnes ayant traversé l’enfer n’en ressortent que plus riches et sages...
CV express
Médiatrice en santé mentale au centre hospitalier Henri-Laborit. Egalement consultante et intervenante en promotion prévention et qualité. Fondatrice de l’association Humeur en vrac, suis une fervente défenseure de la promotion de la démocratie sanitaire.
J'aime : le franc-parler, l'ouverture, la diversité, le voyage au sens large, le cinéma et la peinture.
J’aime pas : les conclusions hâtives, les étiquettes, les îles flottantes et le vélo.
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