Emmanuel Boulanger, musique maestro

Emmanuel Boulanger. 60 ans. Châtelleraudais d’adoption. Musicien. Mélomane. Dirige plusieurs chorales et orchestres dans la Vienne et les Deux-Sèvres. Signe particulier : collectionne les instruments du monde entier. Voyageur et curieux aussi.

Arnault Varanne

Le7.info

C’est une caverne d’Ali Baba autant qu’un cabinet de curiosités. Entre le rez-de-chaussée et le premier étage de cette maison châtelleraudaise, ils occupent tout l’espace. A chaque instrument son anecdote, un son particulier, un parfum d’Orient ou des notes en provenance d’Europe de l’Est. Le maître des lieux rêve d’un musée où les visiteurs pourraient essayer ses... 400 instruments amassés tout au long de sa vie. Emmanuel Boulanger, la soixantaine triomphante, les chérit tous. Comme ce djembé fabriqué « pour 10 francs », cette flûte « conçue au coin du feu » ou encore cet ever buree, une clarinette mongole ramenée par des amis d’un périple en Asie. 
« Elle est étonnante, non ? » On ne contredira pas le chef de chœur et d’orchestre, aussi attaché à ses Deux-Sèvres natals qu’à la Vienne, terre d’adoption. L’ancien professeur des écoles et de... musique dans le secondaire arpente les deux départements toute la semaine, d’une chorale à l’autre, d’un orchestre à l’autre, avec l’association La Châtelleraudaise dont il est directeur comme port d’attache.

Danse classique 
et solfège

« La musique, c’est trop bon !,
jubile-t-il. Elle permet de combattre tout un tas de difficultés, scolaires, troubles de la mémoire. Des études ont montré que des gens qui pratiquent régulièrement repoussent certaines maladies, notamment Alzheimer. C’est pour ça que je vais régulièrement dans les Ehpad. » Le clarinettiste est tombé « dedans » 
gamin, alors que l’un de ses instits voulait lui faire sauter une deuxième classe. Refus net de sa grand-mère, qui l’a élevé. « Elle a préféré me mettre à la danse classique et au solfège. A l’époque, le conservatoire se déplaçait dans les écoles... » Bien lui en a pris. On vous parle d’un temps... que ce père de deux grands enfants (34 et 32 ans) ne saurait balayer d’un revers de main. Car s’il a « accompli des tas de choses dans sa vie », le clarinettiste de formation fourmille de projets et regarde résolument devant. Sans appréhension ni routine.

« Cette année, mes trois chœurs (l'Ensemble Vocal de Bressuire, la Croche Chœur de Parthenay et la chorale baillargeoise A Cappella, ndlr) vont chanter Les Sept paroles du Christ sur la croix, de Gounod. Du très classique, quoi ! Et à côté de cela, ils vont chanter des musiques de bandes-annonces de films, de Hans Zimmer, John Williams... Je ne veux pas m’enfermer dans un genre avec mes musiciens et mes choristes. On peut faire de la bonne musique avec tout. » Il s’est même aventuré sur le terrain des mangas et des jeux vidéo.

« Mettre les mauvaises nouvelles à distance »

Ce « grand timide » aimerait être « aussi altruiste que son épouse ». 
Alors il s’efforce de diffuser de bonnes ondes autour de lui, lesquelles se propagent au-delà de ses espérances. Ainsi de sa rencontre avec l’une de ses anciennes élèves de maternelle. 
« Je l’ai croisée au rayon fromages d’un supermarché et elle m’a confié qu’elle chantait tous les soirs à sa fille la comptine que je lui avais apprise... » « Un éléphant se balançait sur une toile, toile d’araignée... » Tout le monde aura reconnu la comptine en question. Et il y a de fortes chances que même les plus rétifs à pousser la chansonnette se laissent embarquer. 


Parce que « la musique est universelle et lance des passerelles entre les peuples », Emmanuel profite de chacun de ses voyages -une quarantaine à ce jour- pour enrichir sa collection d’instruments et d’émotions, de rencontres et d’anecdotes. De sa première flûte sculptée chinée en ex-Yougoslavie, à 18 ans, à sa quête laborieuse d’un birbyné en en Lettonie, l’homme semble inépuisable. Ses concerts en Russie, en Roumanie -il a dirigé un orchestre à cordes- l’ont marqué « à vie ». Heureux Emmanuel Boulanger ? Ça en a tout l’air. Au contact de « toutes les générations », le chef de chœur rayonne. D’autant qu’il a appris à « mettre les mauvaises nouvelles à distance ». « Et je ne m’en porte pas plus mal ! » 
Au soir de sa prestation sur la scène du TEDx Poitiers, le 22 juin, le mélomane avait conclu ainsi : « La pratique musicale, c’est la molécule du bonheur ». Tonnerre d’applaudissements garanti. A quand le musée des instruments du monde entier ?

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