Hier
Cécile Baybaud pour l’état civil, « Cisou » pour le reste du monde. 35 ans. Normando-martinico-guyano-bordelo-pictave. Enthousiaste, hyper-sensible, déterminée. Infirmière de formation, caviste par passion. De l’énergie à revendre et des envies pour plusieurs vies. Présidente du Poitou Bière Festival qui revient les 20 et 21 avril à Buxerolles.
« Poitiers, c’est mon rêve américain ! », lâche Cécile Baybaud avec un enthousiasme sincère. La ville ne l’a pourtant pas immédiatement séduite, sans doute parce que, fraîchement débarquée de Bordeaux, elle n’était pas encore prête à lui donner sa chance. Six mois ont passé. « Et puis un jour j’ai posé mes valises. Vraiment. » Poitiers est devenue son Eldorado, son champ de tous les possibles, une ville familière où tous ceux qui la connaissent l’appellent « Cisou ».
Voilà dix ans donc que la jeune femme, aujourd’hui âgée de 35 ans, a jeté l’ancre entre le palais des ducs d’Aquitaine et (feu) le Palais de la bière, après avoir vogué de sa Normandie natale vers la Martinique originelle de ses parents, de l’inoubliable Guyane de son adolescence au Bordeaux de ses études d’infirmière… et de son premier désenchantement professionnel, dévastateur. Cisou a tenu un an en tant qu’infirmière hospitalière. « J’ai été confrontée à ce qu’est le monde de la santé en France. Vous êtes un citron sec et on vous presse quand même, témoigne-t-elle avec tristesse. Après j’ai connu une phase d’errance, je ne savais plus… » Finalement, elle a rencontré Chanou, infirmière libérale. Ce « coup de foudre humain » l’a pour un temps réconciliée avec le métier, jusqu’au 31 décembre 2020. Et après ? Celle qui, petite, voulait « être commissaire pour commander [son] père policier », puis médecin légiste « pour aider les autres en trouvant et prouvant la vérité de manière scientifique », est devenue… caviste ! Ainsi, depuis trois ans, à sa façon joyeuse et humaniste, Cisou développe avec François Grassin le Dit Vin, à Saint-Georges-lès-Baillargeaux, et tient le bar du Théâtre-auditorium de Poitiers.
Au micro
Mais pas question de s’en tenir à une seule passion. Jamais au grand jamais ! La bouillonnante trentenaire navigue au gré de ses envies avec une fougue communicative, déterminée à approcher tous les rêves qu’elle tient précieusement ancrés en elle depuis l’enfance. Comme animer une émission de radio. Retour en arrière : Cisou se revoit gamine, micro fictif à la main. Il n’y a pas de hasard. A Bordeaux, elle avait commencé à chroniquer des albums pour un webzine. A Poitiers, pendant sept saisons, elle a animé Wiye, sur Pulsar, une émission hebdomadaire « de musiques latines, caribéennes évidemment, d’Afrique de l’Ouest aussi ». « J’aime ce qui sonne. Vivre là-bas a ancré ça en moi, une culture américaine dans le sens continental du terme, explique-t-elle. J’ai grandi avec Malavoi, Kassav, Yuri Buenaventura… Mes standards n’étaient pas Nougaro ou Brassens. »
"Quand je fais les choses, je me sens libérée."
Jamais rassasiée de nouvelles expériences, pendant ses autres « heures perdues », Cisou s’est aussi investie dans la programmation musicale du Palais de la bière, elle est devenue co-gérante d’un bar à vins du centre-ville, elle a fait une formation de praticienne en hypnose, elle a imaginé un projet autour des spiritueux, elle a exploré le vaste monde des bières artisanales et s’est gentiment s’invitée à la table des organisateurs du Poitou Bière Festival (PBF)... « Je ne sais pas faire une seule activité, confesse l’actuelle présidente dudit PBF. Mais ce n’est pas pour autant que je suis dispersée. Tout converge toujours. Chaque activité m’apprend des choses, m’apporte des compétences que je peux ensuite transférer. » La cadette d’une fratrie de quatre enfants a de l’énergie à revendre, depuis toujours. « Quand j’étais petite, ma mère disait déjà que j’étais trop », sourit-elle.
Jardin secret
Karaté, batterie, catéchisme, danses traditionnelles, badminton, kayak ou Léo club, pendant des années la jeune fille a cumulé les activités, de quoi attiser sa curiosité du monde et sa soif d’apprendre. « Pas juste apprendre, comprendre », précise-t-elle. Alors aux carrières toutes tracées de ses parents, dans l’armée puis la police pour l’un, dans l’administration pour l’autre, elle préfère un chemin moins linéaire, fait d’étapes, de virages, de doubles, triples voire quadruples voies afin de multiplier les rencontres, les échanges, la transmission. « Je suis accro aux projets, convient-elle. Quand je fais les choses, je me sens libérée. Sinon je me laisse envahir par un flot de questions. » L’action, « avec plus ou moins de succès », éloigne les moments de doute que cette « solitaire très entourée » ne dévoile qu’à ses très-proches, son conjoint et quelques autres. « J’ai parfois peur de me lancer mais ce n’est pas par crainte de l’échec mais par crainte de décevoir les autres. » Cisou, avoir peur ? « Mon être social est exubérant, mais j’ai mon jardin secret… », glisse-t-elle, prête à aller au bout de ses envies, même celles qu’elle ne connaît pas encore.
Poitou Bière Festival, samedi et dimanche, à La Rotative, à Buxerolles. Plus d’infos sur poitoubierefestival.fr.
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