Aujourd'hui
Une fresque pro-palestinienne dessinée sur l’un des murs d’expression libre de Poitiers a fait couler beaucoup d’encre en mars. Désormais recouverte par une œuvre considérée comme moins choquante, elle soulève la question de la réglementation autour de ces espaces.
« 75 ans de colonisation, stop génocide. » Il y a un mois, ces mots pro-palestiniens et les illustrations qui les accompagnaient ont suscité l’indignation de la communauté juive de Poitiers. Depuis, le graff du mur d’expression libre du boulevard Tassigny a été recouvert et les tensions se sont apaisées. Ces espaces, mis à disposition par la Ville de Poitiers, ont vu le jour en octobre 2000. L’ex-capitale régionale a d’ailleurs été l’une des premières à en proposer. Jean-Marie Ezzamari, « Jean Jam », connaît ces toiles géantes depuis leur origine. « Il y avait une volonté de mettre en avant la culture street art et les artistes », se souvient le président de l’association Pictav’art. Mais à qui sont destinés ces murs ? « Les graffeurs, artistes ou toute personne qui souhaite s’adonner au graff ou à la fresque de manière générale peuvent s’en emparer », expliquent les services de la Ville. A ce jour, la municipalité enregistre une douzaine de lieux d’expression libre. Parmi eux : le mur de la piscine de la Ganterie, les piles et culées du pont de la voie André-Malraux ou encore le transformateur d’éclairage de l’avenue de Northampton. « Ces murs sont la propriété de Poitiers mais ils ne sont pas gérés par un service dédié. Ils peuvent être utilisés librement. »
Éviter les dérives
« En libre utilisation », certes, mais avec des règles. « Au début, il y avait une charte pour poser un cadre. Puis les années ont passé et comme tout se déroulait dans le respect et la bonne entente, on l’a presque oubliée », indique Jean Jam. C’est lors des événements du mois dernier que la question de la réglementation est revenue. Les passants choqués par la fresque ont en effet interpellé la collectivité qui a dû prendre des mesures et effacer l’œuvre. Les conditions d’exploitation des murs d’expression libre sont définies par un arrêté. Il est notamment indiqué que « la mise en œuvre des graphes doit avoir lieu dans le respect des principes relevant de l’ordre, de la salubrité et de la sécurité publics. Ils ne doivent, en aucune façon, attenter à la décence et aux bonnes mœurs ». Déçu pour les autrices de la fresque, Jean-Marie Ezzamarie comprend néanmoins la décision de la municipalité. « Ce n’est pas de la censure. Il y a des règles, ces murs appartiennent à la Ville donc on doit s’adapter. Nous nous attendons à ce genre de choses. C’est un peu le sens de l’art de faire réagir. Et puis je craignais que cela ne dégénère avec des messages d’incitation à la haine. » L’artiste s’estime chanceux de pouvoir s’exprimer sur les murs de Poitiers. « Dans certaines villes comme Marseille, les fresques sont recouvertes par des tags. C’est plutôt détente ici, cela se fait dans le respect. Et puis… ça évite de voir des murs gris. »
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