Trop de combats...

La vie de l’abbé Pierre peut-elle tenir dans un long-métrage ? C’est toute la question posée par le nouveau film de Frédéric Tellier qui, à trop vouloir en dire, tombe dans un catalogue un peu scolaire.

Claire Brugier

Le7.info

En 1989, Denis Amar s’était concentré sur l’hiver 1954 pour dépeindre l’engagement de l’abbé Pierre. Dans son dernier long-métrage, Frédéric Tellier, lui, prend tout. Depuis le couvent des Capucins de Crest, où Henri Grouès a dû renoncer à une vie monacale, jusqu’à sa mort en 2007, en passant évidemment par la création d’Emmaüs, L’abbé Pierre, une vie de combats, propose un déroulé chronologique de la vie du prêtre. A n’en pas douter, la promesse du titre est tenue. Cela suffit-il à faire de ce biopic un grand film ? Assurément pas, ne serait-ce que parce que résumer en moins de deux heures et demie quatre-vingt-quatorze ans d’une vie particulièrement riche, le pari n’est pas seulement osé, il tient de l’impossible.

Pour tenter de le relever, Frédéric Tellier fait le choix d’une construction certes efficace mais tellement rigide. La vie de l’abbé se retrouve découpée en chapitres, marqués par des fondus au noir parfois un peu brutaux. 1937, 1943, 1952, 1954 1958, 1966… Les années défilent comme dans un vieux manuel scolaire. Pour rendre le catalogue plus digeste, le réalisateur mélange ici et là la grande Histoire et des scènes plus prosaïques, qui en deviennent par contraste presque incongrues. Il joue avec la caméra qui, rarement statique, prend régulièrement de l’altitude, tremble sous les détonations des tirs allemands, caresse des paysages dignes de tableaux de Millet. Elle se faufile sous un bras, frôle une oreille, souffle sur une nuque.

Malgré tout l’ennui guette. Ne serait l’interprétation confondante de sincérité de Benjamin Lavernhe de la Comédie-Française. Le Poitevin inonde l’écran des doutes, des colères, des émotions de son personnage. Il porte littéralement ce film qui, outre un intérêt historique certain, a le mérite de rendre à Lucie Coutaz (Emmanuelle Bercot peu convaincante) la place qui fut la sienne à côté de « la voix des sans-voix ».

Drame de Frédéric Tellier, avec Benjamin Lavernhe, Emmanuelle Bercot, Michel Vuillermoz (2h18).

À lire aussi ...