
Aujourd'hui
L'industrie de la Défense sera inévitablement mise à contribution dans les prochaines années. L’Ensma sera-t-elle impactée ?
« Nous sommes face à un paradoxe. D’un côté, les industriels de l’aéronautique affichent une sérénité inédite, avec des carnets de commandes remplis comme jamais auparavant. Des entreprises partenaires telles que Dassault ou Thales bénéficient d’une visibilité à long terme et sollicitent activement nos étudiants. De l’autre, nous évoluons dans un climat d’incertitude, où des décisions majeures peuvent être prises du jour au lendemain. Depuis l’investiture de Trump, de nombreux paramètres ont changé. Notre priorité reste d’adapter nos formations aux besoins du monde industriel, mais nous ne pouvons pas pour autant élargir nos effectifs (800 élèves), car cela ne correspond pas à notre modèle économique. En revanche, nous restons attentifs aux évolutions du secteur et aux opportunités de développement de nouvelles formations. »
Observez-vous un attrait particulier pour les métiers de la Défense chez vos étudiants ?
« Le domaine de la Défense est très médiatisé en raison du contexte géopolitique, mais nos formations couvrent bien d’autres secteurs. Les étudiants en sont conscients. J’observe un fort intérêt pour le spatial ainsi que pour les énergies. Par ailleurs, nos partenariats avec de grands groupes aéronautiques comme Dassault, Airbus ou Safran ont renforcé l’attrait de nos élèves pour l’aéronautique, 90% de nos élèves accèdent à ce type d’entreprise. Concernant ceux qui s’orientent vers la Défense, il y a une évolution dans leur perception du secteur. Les jeunes y voient avant tout un enjeu de souveraineté nationale et de protection, bien plus qu’un domaine à vocation offensive. »
De nombreux élèves suivent des cursus à l’étranger, notamment aux Etats-Unis. Avez-vous constaté des changements dans leurs destinations ?
« Il est encore un peu tôt pour le dire. Mais il est vrai qu’il y a beaucoup de questionnement et de bruits de couloir. On a augmenté la dose d’incertitude sur l'avenir, c'est indéniable. Ce qui est sûr, c’est que certaines destinations sont désormais moins recommandées, tant pour les étudiants que pour les entreprises partenaires. Ces dernières réfléchissent à deux fois avant d’envoyer leurs talents dans certains pays. Plus que jamais la prudence est de mise. Nous nous efforçons d’obtenir des informations fiables, ce qui est d’autant plus complexe lorsqu’il s’agit de secteurs sensibles comme celui de la Défense. »
On entend souvent dire que la France peine à retenir ses talents. L’avez-vous constaté ?
« Nos étudiants effectuent régulièrement des séjours à l’international, car les grands groupes disposent de sites un peu partout dans le monde. Mais nous voyons aussi de nombreux élèves revenir des Etats-Unis ou d’autres pays pour poursuivre leur carrière en France. Il n’y a pas de fuite des cerveaux, chacun saisit les opportunités qui se présentent. La France n’a pas à rougir de son attractivité. Le niveau de la recherche y est excellent, et nos entreprises offrent des perspectives solides. »
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