Le Regard de la semaine est signé Théophanie Le Dez.
Alors que mon aventure canadienne touche à sa fin, il me semblait important de parler d’une question cruciale au Canada, et plus encore à Moncton : celle de la langue. Historiquement, Moncton se situe en Acadie, une région colonisée tour à tour par les Français et les Anglais, jusqu’à ce qu’elle soit rayée des cartes après la déportation des Acadiens et la prise de contrôle des Anglais sur le territoire en 1755. Cependant, le peuple francophone d’Acadie a perduré, ainsi que sa culture et ses coutumes. Comment, alors, expliquer la survie des Acadiens et de leur langue dans une situation de minorité ? Par la vitalité ethnolinguistique. Il s’agit de la capacité d’un groupe ethnolinguistique minoritaire (ici, les francophones dans une région anglaise) à maintenir et transmettre sa langue et sa culture aux générations futures. Cette vitalité dépend de nombreux critères : la volonté de conservation culturelle de la communauté, les institutions et politiques qu’elle a mises en place.
Dans le cas de Moncton, la loi sur les langues officielles de 1969 a permis l’instauration du bilinguisme officiel. Il s’agit du droit pour les citoyens à recevoir des services commerciaux, institutionnels et gouvernementaux dans la langue de leur choix. Cependant, de simples lois ne suffisent pas à assurer la vitalité d’une communauté minoritaire. Il est nécessaire pour cette dernière d’avoir des institutions qui la protègent. Cela s’appelle la complétude institutionnelle. Ainsi, à Moncton, il existe des institutions hétérogènes françaises afin de protéger les droits du peuple francophone canadien : l’hôpital, le centre culturel Aberdeen, la Radio-Canada Acadie, la Société acadienne du Nouveau-Brunswick ou encore l’université de Moncton, où j’ai pu étudier ce semestre.
Mais comment comprendre ce besoin de protection de la vitalité ethnolinguistique au Canada ? Tout simplement pour éviter le risque d’assimilation, soit la disparition d’une culture au profit d’une autre en situation majoritaire, ici l’anglais. C’est particulièrement le cas dans le cadre de la mondialisation et de la place cruciale de l’anglais dans l’économie internationale. Alors qu’on observe déjà une acculturation très forte dans la région (le fait d’adopter la culture anglo-américaine : par exemple, d’écouter des artistes américains au lieu d’artistes acadiens), la question de la vitalité francophone au Canada prend donc une ampleur toujours plus importante.
CV express
Native de Poitiers, je suis aujourd’hui étudiante en lettres-sciences politiques. Ayant fait un stage à la rédaction du 7, je suis plus qu’heu- reuse d’apporter ma pierre à l’édifice et d’évoluer dans le journalisme. J’espère vous faire voyager avec moi, notamment lors de mon Erasmus au Canada !
J'aime : le sport sous toutes ses formes, les documentaires de décryptage, la librairie Mollat à Bordeaux, voyager, la géopolitique.
J’aime pas : les opportunistes, faire la cuisine, la pression des examens, les blessures, les climatosceptiques.