Les équipes de La Vallée des singes n’avaient jamais mis en place une telle procédure. Mercredi 6 octobre, elles ont transféré neuf bonobos de Romagne vers un zoo néerlandais. L’occasion d’alimenter des recherches sur cette espèce endémique de la République du Congo.
Dans sa cage, Bondo ronfle comme un sonneur. Il est l’un des neuf bonobos de la Vallée des singes à prendre la route vers le parc zoologique de Rhenen, aux Pays-Bas. L’événement, validé par le Programme européen d’élevage (EEP) de l’espèce, est unique en France, en Europe et peut-être même au monde, mais le jeune mâle dort. L’entraînement mis en place depuis près de deux ans pour les préparer, lui et son groupe, à ce transfert inédit, a parfaitement fonctionné. « Ce sont des animaux très sensibles au stress », confie Nathalie Audiguet, la directrice-adjointe du parc. Pourtant, le jour J, mercredi dernier, ils n’ont quasiment rien perçu de l’agitation, à pas feutrés et voix basses, qui a régné autour d’eux. « Nous avons appris aux animaux à nous présenter la cuisse, à ne pas avoir peur de la seringue avec le capuchon, de la seringue avec l’aiguille, puis de l’injection avec du sérum physiologique, raconte Carole, l’une des soigneurs. Tout repose sur la confiance. Sans cela, nous ne pouvons rien faire. »
La matinée s’est déroulée sous haute surveillance médicale. Première étape : anesthésier les singes, en deux vagues, sans fléchage. Deuxième étape :
procéder aux différents examens médicaux. « Certains sont obligatoires, d’autres entrent dans des protocoles de recherche », explique Bertille Marquet. La vétérinaire du parc, avec le concours exceptionnel de confrères et des soigneurs, a orchestré l’endormissement, les différents prélèvements (sang, poils, selles…) et mesures (fréquence cardiaque, glycémie...), puis le réveil des grands singes.
Sujets d’études
« Tout au long de l’année, des scientifiques viennent de partout en France, d’Italie, d’Angleterre, de Belgique, des Etats-Unis pour étudier leur nutrition, leur comportement, leur cognition…, rappelle Jean-Pascal Guéry, directeur animalier. Mais d’ordinaire, ce sont toujours des recherches non invasives. » L’anesthésie va permettre d’autres observations comme l’étude, grâce à l’ADN, du brassage des animaux à l’état sauvage.
Placés dans des caisses individuelles, sauf les mamans et leurs bébés, les neufs bonobos ont été transportés par deux camions jusqu’à Rhenen, soit douze heures de trajet entrecoupées de pauses. Deux soigneurs du parc de Romagne, Marielle et Franck, les ont accompagnés jusqu’à leur nouvel environnement, construit spécifiquement pour eux.
Il en reste désormais dix-huit -les seuls en France- à La Vallée des singes. Pour l’instant… Depuis l’arrivée des cinq premiers, en 2009, le parc a accueilli sept naissances. Parallèlement, via son Conservatoire pour la protection des primates, il soutient l’ONG Mbou Mon Tour. L’espèce, endémique de la République du Congo, est menacée. Il resterait actuellement 5 000 à 20 000 bonobos dans la nature.