mardi 24 décembre
Outre la crise sanitaire, les infirmiers anesthésistes sont actuellement confrontés à une crise statutaire qui dévalorise et menace leur spécialité. Des personnels du CHU de Poitiers ont débrayé lundi pour dénoncer cette situation.
A l’hôpital, eux aussi sont essentiels. Ils l’ont démontré au cours des derniers mois en venant prêter main-forte en réanimation, aux transports sanitaires… Leur polyvalence aura été un atout dans cette période de crise sanitaire. Pourtant, les infirmiers anesthésistes (IADE) restent relativement méconnus du grand public.
Au CHU de Poitiers, ils composent une équipe pluridisciplinaire d’un peu moins de 70 personnels. Sous la responsabilité d’un médecin anesthésiste-réanimateur, ils sont en mesure de réaliser, en autonomie, des soins et gestes techniques dans les domaines de l’anesthésie, de la réanimation, de la prise en charge de la douleur et de la médecine d’urgence. En bref, ils sont des « couteaux suisses » de l’hôpital public. « Au bloc, le travail en binôme avec le médecin anesthésiste se fait en étroite collaboration et confiance. En cas d’incident, on est les premiers à alerter, à faire les gestes d’urgence, sans qu’il y ait besoin de prescription », explique Guillaume Beaumatin, infirmier anesthésiste au CHU de Poitiers.
Un métier en voie de « morcellement »
Dans leur spécialité, ils sont parmi les infirmiers les plus qualifiés à l’échelle mondiale, titulaires d’un diplôme de grade master 2. « Mais on l’impression d’être de moins en moins reconnus aujourd’hui », souffle Guillaume Beaumatin. En cause, la création en 2020 du métier d’infirmier en pratique avancée (IPA), qui vient grignoter l’un des champs d’action des infirmiers anesthésistes, en l’occurrence la médecine d’urgence. « A l’origine, il devait juste être dédié aux pathologies chroniques et c’était très bien. Mais ce n’est plus le cas. »
Surtout, ce nouveau métier se montre plus attractif : la formation est bien moins longue et la grille salariale plus élevée, puisque l’IPA est intégré dans le corps des auxiliaires médicaux en pratique avancée (AMPA). Ce qui n’est pas le cas des infirmiers anesthésistes, en dépit de leur transversalité. « La Société française d’anesthésie et de réanimation nous reconnaît pourtant comme AMPA(*) », précise Elodie Meunier, infirmière anesthésiste au CHU. Voilà pourquoi les personnels ont débrayé lundi, à Poitiers comme dans toute la France, avec le soutien de leur direction. « Nous souhaitons seulement être reconnus pour le travail que l’on fait. »
En creux, ils redoutent que ce « morcellement » de leur spécialité se fasse au détriment du confort et de la sécurité du patient. Et à terme qu’il débouche sur la disparition du métier d’infirmier anesthésiste. Fin avril, plusieurs parlementaires ont transmis un courrier au ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, demandant à ce que la profession soit intégrée dans le corps des AMPA « afin qu’ils (les infirmiers anesthésistes) soient considérés à l’identique de leurs collègues, à leur juste mérite ».
(*) Auxiliaires médicaux en pratique avancée.
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