Hier
Laisse-moi analyser tes eaux usées et je te dirai qui tu es… Ou, très utile par les temps qui courent, je te dirai comment circule la Covid-19. C’est précisément l’objectif du réseau national Obépine que la station d’épuration de Poitiers a intégré en début d’année.
Pas moins de 15 à 17 000m3 d’eaux usées se déversent chaque jour à la station d’épuration de La Folie, à Poitiers. « Par temps sec », précise Alexandre Rivière, le responsable des analyses et du suivi. Par temps de pluie, évidemment, les volumes sont plus importants mais les données recueillies tout aussi signifiantes. Non seulement l’analyse des eaux usées renseigne sur la présence d’oxygène, de nitrates, de nitrites, d’azote et autres matières en suspension, mais elle peut quasiment « prédire » l’évolution de l’épidémie de Covid-19 plusieurs jours avant l’apparition de symptômes physiques.
Ce que les marins-pompiers de Marseille ont mis en place à l’échelle de leur agglomération, le réseau Obépine (Observatoire épidémiologique dans les eaux usées) l’a étendu à tout le territoire national grâce à 150 stations d’épuration. Dont celle de La Folie, à Poitiers. Le premier prélèvement a eu lieu en février. Le site, le plus important dans la Vienne, draine les eaux de dix des treize communes de l’ancien périmètre de Grand Poitiers, soit près de 80% de sa population. « Les prélèvements effectués en tête de station deux fois par semaine permettent d’évaluer la progression ou la régression du virus, résume Laurent Lucaud, vice-président de Grand Poitiers en charge de l’Eau et de l’Assainissement. C’est une mission de santé publique. Actuellement, la progression a tendance à s’infléchir. Mais nous ne sommes pas épidémiologistes ! »
Deux prélèvements par semaine
Depuis le début de l’année, la station poitevine a donc intégré à son calendrier analytique annuel (156 prélèvements par an) deux prélèvements hebdomadaires à destination de laboratoires parisiens agréés. De minuit à minuit, un préleveur automatique installé en entrée de station extrait 60ml tous les 120m3. Ils atterrissent dans un bidon de 7 à 8 litres, réfrigéré à 4°C, dans lequel Mathilde Lartigue et Mathieu Bonnin, les deux laborantins, viennent prélever un échantillon, deux fois par semaine sans jour fixe. Celui-ci est ensuite acheminé vers Paris dans la journée. Les résultats sont rendus sous 48 heures et les données sont accessibles au grand public une semaine après sur reseau-obepine.fr.
« En avril 2020, nous avions envoyé un échantillon, qui avait juste révélé des traces de Covid », rappelle Alexandre Rivière. La situation a bien changé. « L’indicateur va de 0 à 150, la présence la plus forte observée sur le réseau national. En ce moment, sur Grand Poitiers, nous sommes au-dessus de 100, ce qui indique une circulation élevée du virus », note Florence Gaboriau, la responsable du service de traitement des eaux usées. « Mais il ne s’agit pas d’être alarmiste, prévient Laurent Lucaud, juste d’avoir des indicateurs précis, au service de l’Agence régionale de santé. Cela nous amène aussi à appeler la population à la vigilance. »
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lundi 23 décembre