
Hier
« Non ! Non ! Non ! Les résidents d’Ehpad n’attendent pas la mort, ils vivent ! » Le docteur Arnaud Caupenne a réagi vivement sur Twitter, le 19 janvier dernier, à des déclarations entendues sur CNews. Le médecin gériatre du CHU de Poitiers n’a pas supporté les propos du Pr Michaël Peyromaure, chef du service d’urologie à l’hôpital Cochin à Paris, qui évoquait la campagne de vaccination contre la Covid-19 en ces termes : « Aller vacciner à marche forcée dans les Ehpad des gens qui attendent la mort, c’est très, très dérangeant. » Au coeur de l’action, Arnaud Caupenne constate au contraire qu’« aujourd’hui les formes graves décèdent en s’asphyxiant dans les unités Covid. Voilà la réalité. Leur permettre d’éviter cela est un principe de dignité humaine ». Quelques jours plus tard, l’association des jeunes gériatres, dont il est le porte-parole, se fendait d’un communiqué pour « mettre fin à l’épidémie d’âgisme ».
Alors que plane l’ombre d’un troisième confinement, l’idée d’assigner à résidence les personnes d’un certain âge fait aussi son chemin. Sans que le seuil ne soit d’ailleurs vraiment fixé. Pour le sociologue poitevin Michel Billé, les choses sont claires : « Il ne faut pas définir une date de péremption. Tout Homme, quel que soit son âge est un être vivant, sa vie n’a pas plus de valeur qu’une autre. Méfions-nous des segmentations sociales inconciliables avec le souci inclusif de la société. » Si chacun peut avoir ses considérations personnelles, là, c’est un choix de société qu’on réclame aux politiques. « Il ne faut pas se sentir coupable d’être vieux, ce n’est pas un privilège, mais un droit », renchérit le spécialiste du vieillissement. Qui appelle à ouvrir un « dialogue entre les générations » pour que chacune comprenne la valeur de l’autre.
La question se pose encore plus gravement dans certains Ehpad où « pour protéger, on va enfermer et isoler », constate Michel Billé. Il n’accuse pas ces établissements, soumis à des règles administratives. Il questionne des pratiques. Tout comme le Pr Roger Gil rappelle que « la liberté de voir ses proches joue sur la santé ». Le directeur de l’Espace régional de réflexion éthique évoque des « tensions entre une volonté sécuritaire et le bien-être des gens ». « Il ne faudrait pas affaisser le désir de vivre des personnes âgées sous prétexte de les protéger. » Non aux règles appliquées « de façon aveugle ». Pour lui, il est nécessaire de « personnaliser » la prise en charge en ces temps de crise. D’ailleurs, plus largement, le Pr Gil propose de substituer le « concept de vulnérabilité » à celui de l’âge. Ce qui aurait pour mérite d’intégrer des facteurs de comorbidité tels que des maladies chroniques. Comme pour la vaccination. Dans la Vienne,
44 000 personnes sont ainsi jugées prioritaires. L’âge ne serait plus qu’« un facteur de risque parmi d’autres ». Et ce serait alors au « médecin traitant de prescrire le confinement ». Au plus près de la personne concernée.
Pour aller plus loin, Michel Billé sera l’invité de 7 à la Une, ce mardi à 12h, sur la page Facebook du 7.
À lire aussi ...