Et vous, comment ça va mal ?

Le reconfinement a plongé des millions de Français dans un désarroi encore plus profond qu’au printemps. Entre peur de pointer au chômage, de rater ses études ou d’attraper le virus, le moral est très atteint. Et les professionnels de santé s’inquiètent.

Arnault Varanne

Le7.info

Ce n’est une surprise pour personne : notre moral est en chute libre. A dix jours de fêtes de Noël très particulières, toutes les catégories sociales et tranches d’âge s’inquiètent des effets durables de la pandémie. « Les gens souffrent bien plus du second confinement que du premier », témoigne Magali Delamour. Comme ses collègues, la psychologue clinicienne est « débordée ». « La longueur dans l’épreuve est très difficile à supporter, notamment pour ceux qui avaient déjà des fragilités. L’absence de capacité de projection pèse à court et moyen termes. » SOS Amitié enregistre 30% d’appels supplémentaires depuis le printemps.

Des étudiants hospitalisés en psychiatrie

Il en va des personnes âgées en Ehpad ou seules comme des jeunes. Il ne se passe pas une semaine sans que les agents du service de santé universitaire ne soient obligés d’hospitaliser des étudiants en psychiatrie. Pour les protéger d’eux-mêmes. « Ce n’était évidemment pas le cas les autres années, au moins dans ces proportions », confirme Jean-Charles Le Tarnec. Le médecin, responsable du service, est cash : « Les étudiants ne vont pas bien. Ils ont peur de rater leurs études, de ne pas avoir de stage... Tout va tellement vite dans les décisions qu’ils finissent par être complètement perdus. Imaginez les première année qui ont eu un bac « au rabais » et enchaînent sur un premier semestre à distance. » A la « perte de valeurs et de repères », il faut ajouter des considérations plus matérielles. « Certains n’ont plus de travail et peinent à se nourrir, tout simplement. » Les infirmières, médecins généralistes et psychologues -l’équipe a été renforcée- s’efforcent donc de les écouter et de les accompagner. « Mais tous ne franchissent pas la porte du service », reconnaît Jean-Charles Le Tarnec.

« Un après-confinement »

Au centre hospitalier Henri-Laborit, on mesure aussi les effets très pervers de ce deuxième confinement. A fortiori auprès de personnes déjà suivies et donc plus sensibles. « Elles nous demandent de ne pas les lâcher », confirme le Dr Carole Wangermez. Car les patients souffrant de troubles anxieux développent plus facilement que d’autres « une phobie sociale, une peur panique dans les magasins... » Le Centre médico-psychologique accueille du reste de plus en plus de « jeunes patients ». « Hélas, il y aura un après-confinement avec d’autres profils, des gens dans la précarité », prévient déjà la psychiatre.

Si les structures d’écoute se démultiplient (CovidEcoute, SOS Amitié, Apaisa pour les chefs d’entreprise...), l’incertitude générée par la crise sanitaire demeure trop forte. Et les moyens insuffisants ? Yves Pétard en est persuadé. Le délégué Vienne de l’Unafam(*) veut dépasser « les deux discours qui ont prévalu ces derniers mois sur l’impératif sanitaire et économique. La psy était en crise avant la Covid, ça ne s’arrange pas. Nous avons demandé que la santé mentale soit décrétée grande cause nationale en 2021 ».

(*)Union nationale de familles et amis de personnes malades et ou handicapées psychiques.

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