« Viens chez moi, j’habite chez ma grand-mère… »

Le Regard (truculent) de la semaine est signé Delphine Roux.

Le7.info

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Vous vous souvenez de cette chanson de Renaud « Viens chez moi, j’habite chez une copine » ? Eh bien moi, j’habite chez ma grand-mère ! Fraîchement « expatriée » à Paris, la provinciale pictavienne naïve croit que se loger est facile. Que nenni, en attendant d’obtenir le Saint Graal de 30m2 qui vous coûte au moins un organe par mois, il m’a fallu trouver un toit hospitalier. L’hospitalité fut offerte par ma grand-mère, 92 ans et toutes ses dents.
 Alors, vous allez me dire que c’est très moderne comme concept, très humaniste, très écolo, très « logement solidaire : un toit, deux générations ». Que grâce à ma présence, cela va rompre son isolement, que grâce à elle je vais maintenir à flot mon compte en banque.

Oui mais... Cette cohabitation me fait endosser le rôle d’historienne, d’ethnologue, de linguiste, de sociologue. Bref, vivre avec sa grand-mère, c’est entrer dans un univers parallèle.
 D’abord, il y a les napperons ! Il y en a trente-quatre ! Des petits, des gros, des ronds des oblongs… Sous des pots, sur les fauteuils, tables de nuit, sous toutes les lampes ! Et même un sur la télévision qu’on doit appeler « le poste ». Eh oui ici, on allume le poste à heure fixe et on « soupe ». Malheur à celui qui bouge le napperon sans le remettre à sa place, tout est codifié, chaque chose est à sa place. 

Deux mondes tellement différents, deux femmes opposées et pourtant si proches. Parce que malgré nos différences de modes de vie, nous partageons un toit, un foyer d’une chaleur indicible et pudique. Moqueuses mais curieuses, nous nous raillons l’une l’autre sur nos travers de vie, nos habitudes ubuesques pour elle, kafkaïennes pour moi, mais toujours dans le respect de cette altérité et de cette singularité qui nous définissent aux yeux de l’autre. Etrangères et si semblables malgré tout. 

La pandémie aura certainement mis une claque à ces échanges intergénérationnels. Comme c’est dommage, nous avons tant à apprendre de nos aînés. En tout cas, si vous n’arrivez pas à dormir, au lieu de compter les moutons, pensez à compter les napperons…

CV express
Professeure de lettres-histoires pendant 13 ans, personnel de direction en collège et lycée depuis 2015 dans l'académie de Poitiers. Directrice du collège EIB Monceau à Paris depuis août 2020. Chargée de communication de l’école de comédie musicale Broadway School, qui a ouvert en septembre. Mère de deux enfants de 11 et 13 ans.

J'aime : l'art et la culture, les langues étrangères, le yoga, le running, les voyages, les chats et les framboises.

J'aime pas : le sexisme, le racisme, les embouteillages, les insomnies, les moustiques et les choux de Bruxelles.

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