Le casse-tête des logements vacants

D’après l’Insee, la France compterait près de trois millions de logements vacants. Rien que dans la Vienne, on en dénombre plus de 220 000. Les causes varient fortement en fonction des secteurs géographiques.

Florie Doublet

Le7.info

A Poitiers, au 11, rue Jean-Jaurès, un immeuble reste désespérément vide. Cette grande demeure de 500m2, totalement obturée, attend une restauration depuis près d’une décennie. En plein secteur sauvegardé -à deux pas du musée Sainte-Croix, de la cathédrale Saint-Pierre, du baptistère Saint- Jean…- elle pourrait être promise à un bel avenir.

La mairie de Poitiers a décidé de prendre les choses en main en lançant, dès avril 2016, une « Opération de restauration immobilière » (*). La procédure suit son cours et pourrait s’achever par… une expropriation. « C’est une solution, mais ce n’est pas celle que nous souhaitons, affirme Bernard Cornu, adjoint à l’Urbanisme. Notre objectif est de rendre cet endroit à nouveau habitable. »

Selon les derniers chiffres publiés par l’Insee, près de 9% des logements seraient vacants à Poitiers, dont une grande majorité de T1 et T2. Cette particularité s’explique aisément. Dans les années 2000, la ville a vu sa population estudiantine croître de manière exponentielle. Les propriétaires de grandes maisons de ville ont, logiquement, préféré découper leurs biens en petits logements pour les louer facilement.

« UN VÉRITABLE GÂCHIS »

Après avoir chuté, le nombre d’étudiants repart à la hausse, la colocation s’est développée, mais les studios ne séduisent plus. Les conséquences, notamment sociologiques, se font déjà sentir. « Nous constatons un déficit de T3 et T4 en centre-ville, rendant difficile l’installation de couples avec enfants », détaille Bernard Cornu. Même constat à Saint-Eloi, où, pour louer leur appartement plus facilement, certains propriétaires offrent jusqu’à trois mois de loyer !

Ce problème est surveillé « de très près » par les élus poitevins. Néanmoins, la vacance s’avère encore plus préoccupante dans les zones rurales. « De nombreuses communes, notamment du Montmorillonnais, ont un taux de vacance avoisinant les 12%. C’est un véritable gâchis, regrette Ghislain Delaroche, directeur de l’Adil (Agence départementale information logement). De manière générale, la piètre qualité du logement est en cause. La rénovation d’un bâtiment constitue un important effort financier de la part des propriétaires bailleurs, qui n’ont même pas la garantie de trouver un locataire. »

LA CRAINTE DES IMPAYÉS

Certains propriétaires ne peuvent pas louer. D’autres ne veulent plus. C’est le cas de Marie, infirmière poitevine, qui a vécu une expérience pour le moins désagréable. « Ma maison m’a été rendue dans un état indescriptible. J’en ai eu pour 20 000€ de travaux et j’ai juste récupéré 1000€ de caution. Désormais, je comprends les réticences des propriétaires. La location et moi, c’est terminé. »

Des témoignages comme celui de Marie, l’UNPI86 (Union Nationale de la Propriété Immobilière) en recueille des dizaines chaque année. « Bien sûr que nos adhérents deviennent frileux ! La crainte des dégradations et des impayés reste forte. La loi Duflot n’a pas permis d’améliorer la situation. Bien au contraire… » assure Françoise Charpentier, conseillère de l’association. Les derniers chiffres montrent cependant que le taux d’impayés s’élève à moins de 5% dans le parc locatif français.

(*) Une ORI permet à une collectivité publique d’enclencher la réalisation de travaux, dans le cadre de politiques locales d’amélioration de l’habitat.

À lire aussi ...