Dans la Vienne, une poignée de bénévoles s’attellent à améliorer le quotidien des demandeurs d’asile. Certains iront même jusqu’à les accueillir dans leur famille pour les fêtes de fin d’année.
Bernard donne des cours de français à un groupe de cinq réfugiés installés, depuis octobre, à Mignaloux-Beauvoir. Et devinez quel était le thème de la leçon de mercredi dernier ? Noël, évidemment ! Mots et expressions, le lexique complet y est passé. Pour cette première année de coexistence, la municipalité de Mignaloux a décidé de ne rien organiser de particulier. Mais certains bénévoles comme Bernard ont pris les choses en main. « On s’est mis d’accord. Avec mon épouse, nous avons proposé d’accueillir deux réfugiés pour le déjeuner du 25 décembre. Les trois autres iront dans d’autres familles. » Les réfugiés ont également partagé récemment un dîner de fin d’année avec les travailleurs handicapés de l’Esat Essor, qui sont logés dans le même bâtiment. A la question de savoir s’ils peuvent s’entendre avec eux, la réponse est désormais claire. C’est oui !
On a beaucoup parlé de l’arrivée des migrants dans la Vienne, après le démantèlement de la « jungle » de Calais. Ceux-là ont été hébergés dans des Centres d’accueil et d’orientation (CAO), en attendant l’instruction de leur demande d’asile. Mais bien d’autres débarquent à Poitiers par leurs propres moyens, en silence, et restent parfois dehors quelques jours ou plusieurs semaines. C’est le cas de Catherine. Âgée de 39 ans, elle a fui son Afrique natale avec son fils Christian, 10 ans, pour des raisons qu’elle ne souhaite pas rendre publiques. Direction Paris, puis Niort sur les conseils d’une amie car elle ne trouvait pas de logement dans la capitale. Le 28 novembre, elle a rejoint Poitiers et sa Plateforme d’accueil des demandeurs d’asile (Pada). Là, Catherine et Christian vont passer onze jours dans la rue, à dormir dans un coin isolé de la gare.
Ouvrir les yeux
Le 10 décembre, Maryline est venue à sa rencontre, guidée par Le Toit du Monde. C’est une bénévole de l’association Welcome. Embarquée sous son aile, Catherine va très vite être logée dans une maison extraor- dinaire. Un logement « partagé » construit à l’ouest de la ville, en 2013, par deux couples d’amis, les Massé et les Brochoire. « Nous ne pouvions rester les bras croisés bien confortablement installés face à la situation de ces gens laissés à la rue, après avoir tout quitté dans leur pays. Comme dans la légende du Colibri, nous faisons une petite part du travail », raconte Gérard Brochoire.
Dans son studio aménagé à l’étage, Catherine bénéficie d’une entrée indépendante. Elle cuisine avec Geneviève. Ils dînent ensemble presque tous les soirs. « Nous sommes bien ici. Christian a pu aller à l’école dès notre arrivée. Les enseignants ont été très gentils », raconte sa maman. Mère et fils resteront cinq semaines ici, avant de rejoindre une autre famille d’« accueillants ». « C’est le concept. Il ne faut pas que cela devienne une contrainte », note Maryline. Cinq demandeurs d’asile sont actuellement hébergés par des bénévoles de Welcome Poitiers. La plupart du temps dans la chambre d’amis. Un tuteur fait le lien entre les familles et veille à ce que chacun respecte l’autre. L’association aimerait faire plus, mais elle manque de bras.
Pour les fêtes de fin d’année, les Brochoire garderont une assiette pour Catherine et Christian. Sauf si ces derniers décrochent une place en centre d’accueil pour demandeurs d’asile. « C’est possible d’un jour à l’autre. Ce serait une bonne nouvelle. » Le plus beau des cadeaux.