Un long dimanche de discorde

Après Chasseneuil en 2015, Poitiers vient de porter le nombre d’ouvertures dominicales des commerces de trois à cinq par an, balayant un arrêté préfectoral vieux de treize ans. De quoi provoquer la levée de bouclier des partisans de cette exception locale.

Florie Doublet

Le7.info

L’année prochaine, les commerces de Poitiers pourront ouvrir leurs portes cinq dimanches au lieu de trois. Le 5 décembre, le conseil municipal s’est saisi de la loi Macron pour voter une délibération en ce sens. La Ville a ainsi rattrapé son retard sur sa voisine chasseneuillaise. En décembre 2015, le maire Claude Eidelstein avait pris les devants en autorisant cinq ouvertures dominicales par an. « Cela répondait à une forte demande des commerçants, assure-t-il. Et ça fonctionne très bien ainsi. »

Tout le monde n’est pas de cet avis. Maire de Migné-Auxances, Florence Jardin se sent mise devant le fait accompli. « Le bureau de Grand Poitiers s’est réuni le mois dernier. Nous avons décidé d’harmoniser le calendrier pour ne pas favoriser certaines zones commerciales au détriment des autres. Il faut conserver une cohérence territoriale », explique-t-elle. Pourtant, l’élue n’est absolument pas favorable au travail dominical. « Trois dimanches consécutifs en décembre, c’est trop, lâchet- elle. Quand les commerçants vont-ils pouvoir profiter de leur famille ? (*) »

UN APPEL À LA RENÉGOCIATION

Du côté de Force Ouvrière, on va encore plus loin. Pour Alain Barreau, les maires de l’agglomération ont décidé de « piétiner l’accord local de 2003 limitant le travail dominical dans la Vienne ». La Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) confirme que des arrêtés préfectoraux limitent à trois dimanches d’ouverture par an les secteurs de l’habillement, de la chaussure et de la bijouterie- horlogerie. Cette exception commerciale du département s’impose quelle que soit la ville. Pour éviter une confrontation judiciaire, la Dirrecte appelle à une renégociation entre les signataires de l’accord.

Benoît Delsuc est partisan des cinq dimanches, « mais pas un de plus, sous peine de banaliser ce moment, comme les ventes privées ont détourné les clients des soldes ». Le président de Poitiers le Centre souhaite que ces ouvertures restent des « événements commerciaux » exceptionnels. Comme ont pu les organiser les voisins niortais et tourangeaux. Le chef-lieu d’Indre-et-Loire a ainsi opté pour sept dates en 2017 : quatre dimanches en décembre, mais aussi deux autres pour les soldes d’hiver et d’été, ainsi qu’un dernier adossé à la braderie de septembre.
 

Douze dimanches à Chinon
Avec cinq dimanches autorisés, Poitiers reste « mesurée » en comparaison de certaines villes voisines. Du côté d’Angoulême et Chinon, les maires ont décidé de se saisir de « l’opportunité qu’offre la loi Macron ». « Le texte prévoit douze dimanches. Je ne vais pas être plus restrictif que la loi, affirme Jean-Luc Dupont, le maire de Chinon. Les commerces seront ensuite libres d’ouvrir… ou non. »

 

(*) Le conseil muncipal de Migné-Auxances s'est réuni lundi soir et a finalement rejeté (13 voix contre) la délibération proposant cinq ouvertures dominicales par an. 

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