Aujourd'hui
« Chloé me manque tellement… »
Catégories : Société, Social, Solidarité Date : mardi 22 novembre 2016Le 13 novembre 2015, Chloé Boissinot tombait sous les balles des terroristes, à la terrasse du Carillon, un café du 11e arrondissement de Paris. Un an après les terribles attentats dans la capitale, sa mère Elisabeth peine toujours à faire son deuil.
Sur son avant-bras droit, un tatouage interpelle. A l’encre indélébile, deux dates y sont inscrites : « 20-11-1989 - 13 11 2016 ». La première renvoie à la naissance de Chloé, la seconde à son assassinat, un soir d’automne comme la France n’en avait jamais connu. Sa mère, Elisabeth Boissinot, souffre encore dans sa chair comme si c’était hier. « Je suis presque plus mal qu’il y a un an », avoue-t-elle entre deux sanglots. Témoigner auprès des médias lui permet d’exorciser une angoisse indicible. La mort de « son enfant » l’a plongée dans une détresse incommensurable. « Plus le temps passe, plus son absence se fait ressentir. Nous allons passer un deuxième Noël sans Chloé. »
Ses cinq autres enfants, cinq petits-enfants et son mari vivent, a contrario, davantage dans l’ombre que dans la lumière médiatique. « Contrairement à eux, j’ai besoin qu’on parle de Chloé, de regarder les reportages sur les attentats. C’est plus facile d’accepter sa mort parce qu’elle est partie avec beaucoup d’autres jeunes. Pour moi, c’est une héroïne… » Sa colère initiale -« elle m’aurait détruite à force »-, dirigée contre l’Etat ou les services des impôts, a laissé place à des réactions plus mesurées. Les nombreux témoignages de soutien, laissées sur les réseaux sociaux, lui ont aussi permis d’« aller un peu mieux ». « Lire le livre de Georges Salines (*), qui a également perdu sa fille le 13 novembre, ça m’aide », admet cette habitante de Château-Larcher.
« Un procès ? Je n’en attends rien »
Et maintenant ? Maintenant que les cérémonies hommage ont eu lieu à Paris ? Qu’Elisabeth Boissinot et ses proches ont pu « rencontrer d’autres familles endeuillées» ?... L’intéressée a promis aux siens de « passer à autre chose », au moins de refuser les sollicitations médiatiques. Pour le reste, elle ne désespère pas, un jour, de rencontrer Salah Abdeslam, la figure vivante des attentats du 13 novembre. « Juste pour lui montrer une photo de Chloé, le regarder en face. Je ne veux pas d’excuse de sa part, ni même de pardon. Un procès ? Je n’en attends rien, sa culpabilité ne fait pas de doutes. » Elle l’a écrit à François Hollande, qui lui a répondu. C’était le troisième échange de courriers entre eux.
Forte de sa notoriété, Babette Boissinot aimerait aussi, par-dessus tout, « que ça n’arrive plus ». Autrement dit que sa fille ne soit pas morte pour rien. L’éducation, mère de toutes les batailles ? Elle acquiesce. Et ajoute dans un sourire plein de sous-entendus. « De mon côté, je dois réapprendre à être mère et grand-mère. Mes enfants ont besoin de moi. » C’est pour eux qu’elle trouve encore la force de vivre. Et puis, de là-haut, « Chloé voudrait que la vie reprenne son cours ».
(*) Père de Lola, l’une des victimes des attentats du 13 novembre et président de l’Association « 13 novembre : fraternité et vérité ».
7 janvier. 13 novembre. 14 juillet. 26 juillet. Quatre dates qui resteront à jamais dans la mémoire collective. Des attentats de Charlie Hebdo à l’assassinat du père Hamel, de la tuerie du Bataclan au carnage de Nice, la France a payé au prix fort ses engagements sur les théâtres extérieurs. Plusieurs mois après ces sinistres événements, rien n’y fait. La douleur des familles de disparu(e)s se dissipe à peine. Reste l’incompréhension, la stupéfaction et l’absence de « l’autre » à endurer au quotidien. Alors, oui, les cérémonies commémoratives sont précieuses pour exercer notre devoir collectif de mémoire. En même temps, ces symboles font revivre aux plus « fragiles » des scènes qu’ils aimeraient voir appartenir à jamais au passé. Puisse l’avenir nous préserver de telles atrocités. Malheureusement, le risque zéro n’existe pas et il faut vivre avec (dans) cette angoisse permanente. Loin d’être évident.
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Patricia Thoré, l'amie des bêtes
Patricia Thoré « de la Maraf ». 67 ans. Originaire de Rochefort, arrivée dans la Vienne en 1998. Ancienne militaire de carrière aujourd’hui responsable de la Maison d’accueil et de retraite des animaux de la ferme, à Salle-en-Toulon. Amie des bêtes et femme de conviction.