Le dernier bac du proviseur

Après trente années d’exercice en tant que chef d’établissement, Bernard Soulignac raccrochera, fin juin, son costume de proviseur. Ses derniers instants à la tête du lycée Louis- Armand, il les passe à orchestrer les épreuves du bac. Avec rigueur et minutie, comme toujours.

Marc-Antoine Lainé

Le7.info

6h45. Dans les couloirs du lycée Louis-Armand, à Poitiers, point de brouhaha ni de défilé d’élèves. Alors que les candidats au baccalauréat prennent la route du centre d’examens, Bernard Soulignac est déjà sur le pied de guerre. Après un rapide check-up avec l’électricien et le peintre de l’établissement, le proviseur fait le tour des salles et s’assure de la présence de ses personnels. La tension est palpable, tout doit être prêt à l’arrivée des jeunes.

7h13. Le moment est venu de sortir les sujets du coffre-fort, pour les répartir dans les différents points de contrôle. Pas question, jusqu’à l’heure H, de jeter ne serait-ce qu’un oeil au contenu des polycopiés. « Les piles de sujets sont arrivées du rectorat à la mi-mai, explique Bernard Soulignac. Cela nous laisse de temps de les trier et de vérifier que nous en avons assez pour l’ensemble de nos candidats. » Depuis un mois, les précieux documents dormaient sagement au fond de la chambre forte du lycée, dont seuls le proviseur et son adjointe connaissent le code d’accès. « Nous ne voulons pas de fuite, comme cela a pu arriver à la Réunion. C’est une vigilance de tous les instants. »

7h24. Dans le hall de Louis-Armand, les élèves affluent. Sourire aux lèvres pour certains, stress à fleur de peau pour d’autres, tous se dirigent vers leur salle d’examen. Répartis par filière, puis par spécialité, les candidats sont surveillés tout au long de l’épreuve par des enseignants et personnels de l’établissement. À un peu plus de trente minutes du coup d’envoi de l’épreuve, Bernard Soulignac passe en revue ses effectifs, en se rendant dans les différentes salles de jury. Les petites mains préparent les piles de sujets, les feuilles d’émargement, les enveloppes et consignes… Tout semble paré.

7h47. Les élèves sont installés, préparent leur copie et attendent sagement 8h. Sur leur table, rien ne traîne. « Nous n’autorisons que le strict nécessaire, souligne le proviseur. Pas de trousse, ni sac, ni téléphone ! » Concernant la triche, les consignes du rectorat sont très claires. Rien ne doit permettre à l’élève de récupérer, à l’extérieur, quelque information que ce soit. Face à la hausse des ventes d’objets connectés, l’académie a tout simplement interdit le port de montre, numérique ou non. Juste au cas où.

8h. Le moment tant attendu (ou redouté) arrive enfin. « Mesdames, messieurs, il est 8h précises, vous avez trois heures », lance un surveillant. De salle en salle, Bernard Soulignac vérifie une dernière fois que tout se passe bien et s’accorde un sourire à la lecture des sujets d’histoire-géographie : « Le Sahara en géo ? Pas évident ! »

8h06. De retour dans son bureau, le proviseur relâche la pression. Tout s’est bien déroulé, reste maintenant à attendre la fin de l’épreuve. Mais pas question pour lui de perdre son temps. « Même si je pars à la fin de l’année, je dois régler quelques dossiers pour la rentrée prochaine. » Pour son dernier bac, Bernard Soulignac se permet néanmoins quelques critiques. « Je ne suis pas inquiet pour le succès de mes lycéens, le taux de réussite devrait avoisiner les 90%. Selon moi, l’examen mériterait d’être repensé. Il n’est qu’un simple rite de passage, mais n’est pas tellement qualifiant et ne correspond pas à tous les profils. Il faudrait que le gouvernement se penche sur la question. » À bon entendeur.

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