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Les Serge sur scène, En Fanfare à l’écran… Quel est votre lien à la musique ?
« Au conservatoire, j’ai très vite adoré les cours de chant. La voix est notre outil de travail, c’est une arme supplémentaire. La Comédie-Française a une programmation au Studio-Théâtre où l’on chante les auteurs sous la forme d’un cabaret. Barbara, Boris Vian, Souchon récemment… Je crois que c’est Eric Ruf qui a le premier évoqué Gainsbourg. Il en a parlé à Stéphane Varupenne et Sébastien Pouderoux, les deux metteurs en scène. Dès le départ, ils ont dit qu’ils ne voulaient pas faire un cabaret mais convoquer l’esprit de Gainsbourg en live à travers une forme hybride, avec ses interviews, ses punchlines, ses aphorismes… On est six en scène et on est tous Serge. Cette mise en abîme me plaisait. On a découvert un homme complexe, paradoxal. »
Auparavant, que connaissiez-vous de lui ?
« Quand je suis arrivé à Paris à 20 ans, mon frère, auteur-compositeur, m’a fait découvrir pas mal d’albums de Gainsbourg. Et je me souviens qu’en boîte de nuit à l’île de Ré ils passaient Couleur Café avant la fermeture. J’avais Gainsbourg dans l’oreille mais, peut-être parce que mon père écoutait beaucoup de musique américaine des années 1970 comme Crosby, Stills, Nash and Young, j’étais plus sensible à la musique qu’aux paroles. J’ai appris à écouter ses textes. Gainsbourg était un communicant hallucinant, il a donné des milliers d’interviews, écrit un roman, fait trois films… Je suis bien content de ne pas avoir été à la place de Stéphane
Varupenne et Sébastien Pouderoux ! Ils ont fait tout le travail de sélection pour parler de la pudeur d’un homme sans cacher son côté provoquant. Aujourd’hui ça frotte avec notre époque, mais c’est sans jugement. Son cynisme, sa misogynie, son rapport à l’argent, ses coups d’éclat avec les médias… »
Comment le public reçoit-il ce spectacle hybride ?
« Jane (ndlr, Birkin) est venue en éclaireur à une représentation et elle nous a fait le plus beau compliment. Elle a dit : « Je vous en veux car vous avez ravivé le manque. » On approche Gainsbourg en étant nous-mêmes, avec nos différentes personnalités et notre jeunesse. Dans le public, il y a les aficionados mais il y a aussi beaucoup de jeunes. Et les gens sont impressionnés par le niveau musical. On change tous d’instrument. Personnellement, je fais de la batterie et j’ai appris la basse. »
Est-ce un défi supplémentaire ?
« Le trac en musique, ce n’est pas pareil. On ne fait pas les malins ! On ne joue pas Serge. On est tous les six très connectés parce qu’on a l’impression que c’est fragile, le Gainsbourg, qu’à la moindre fausse note, on fait une rayure sur le vinyle. Avec le temps, on trouve une aisance qu’on n’avait pas au début, mais on se méfie aussi de la décontraction. Ce n’est pas juste un concert, on doit rendre la sensation de qui il était, ne pas l’imiter, ni lui ni ses intervieweurs d’ailleurs. »
C’est la première fois que vous jouerez au Tap…
« C’était déjà assez dingue de venir présenter En Fanfare dans la grande salle (ndlr, le 29 octobre 2024) ! Avec Yoann Gasiorowski, qui est de Bonneuil-Matours, et Stéphane Varupenne, dont la compagne est Poitevine, on fait le concours de celui qui aura le plus gros clan dans la salle. Evidemment, c’est une date qui compte. J’étais déçu de ne pas y jouer Les Fourberies de Scapin à cause d’un problème technique. C’est aussi la première fois que l’on part en tournée, c’est un peu le « Serge on tour » ! On va jouer aux Eurockéennes de Belfort, au Théâtre de la mer à Sète… On est surexcités que la Comédie-Française nous offre la possibilité de faire de la musique. Faire les balances, c’est le petit fantasme du comédien.
© Vincent Pontet, coll. Comédie-Française
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Thierry Renoux. 54 ans. Aveugle de naissance. Fondu de musique. Pianiste de talent. A vécu quatorze ans aux Etats-Unis. Est revenu à Poitiers après le décès de son épouse Christine. A partagé le piano de Stevie Wonder. Signe particulier : doté de l’oreille absolue et d’une modestie à l’avenant.