Les exportateurs regardent vers les Etats-Unis

L’annonce du président américain Donald Trump de relever les droits de douanes crée plus d’incertitude que d’inquiétude parmi les entreprises exportatrices de la Vienne.

Claire Brugier

Le7.info

« Les tarifs sont pour moi le plus beau mot du dictionnaire. » La phrase, prononcée à dessein par Donald Trump lors de son investiture à la présidence des Etats-Unis, a fait mouche. La perspective d’une hausse de ses tarifs douaniers par le premier importateur mondial ne laisse d’inquiéter, y compris la France dont il est le 4e client. L’économie française pourrait perdre 0,5% d’exportations et 0,1 point de PIB(*), avec parmi les secteurs menacés, qui représentent à eux seuls 35,3% des exportations vers les Etats-Unis, l’aéronautique, les produits pharmaceutiques et les vins et spiritueux. De fait, à l’échelle du Poitou-Charentes, « les PME du Cognac sont inquiètes », constate Emilie Le Gal, chargée d’affaires internationales au CIC Ouest. Plus globalement, « la valeur du dollar, qui ne cesse de monter, n’est pas favorable au sourcing pour les entreprises qui s’approvisionnent aux Etats-Unis. »

French touch

Ce constat a toutefois son pendant positif. « J’y vois une opportunité pour rendre les coûts européens compétitifs », note Maxime Chambon. Et le président du club des exportateurs de la Vienne Futurexport croit aussi à l’effet « french touch » et à la qualité induite par les normes européennes. « On a expédié de la pierre de Chauvigny pour la construction d’une reproduction du château de Vaux-le-Vicomte ! 
Ou encore six containers de « windows à la française » 
(ndlr, produites dans les Deux-Sèvres) !, cite le PDG de B2C Trans. Il faut être vigilant mais il ne faut pas tomber dans la sinistrose. Par ses annonces, Trump veut dynamiter le système, lequel va s’adapter. Le monde se craquèle mais l’eau passe dans les failles. Il faut être l’eau ! Il faut investir dans l’export pour aller chercher les marchés, se réveiller le matin et se demander : où sont mes opportunités ? » 


La présence de Somno Engineering début janvier au CES de Las Vegas en est une illustration. L’entreprise qui développe des solutions pour améliorer le sommeil des patients affiche sa vocation internationale. 
« Nous sommes en attente de certification pour le Canada, la FDA (ndlr, Food and drug administration, aux Etats-Unis), nous sommes prêts pour l’Australie et nous attendons le marquage européen, énumère Maud de la Belleissue, une PDG plutôt sereine. L’économie américaine reste très nationaliste mais pas sur des dispositifs innovants. » 


« Tout dépend 
du produit »

Positionné sur le marché des pièces en acier, Oregon Tool Civray réalise 20% de son chiffre d’affaires aux Etats-Unis, mais son directeur général Patrick Baré craint davantage les tarifs douaniers qui pourraient être mis en place en Asie. Quel que soit le domaine, « tout dépend du produit, résume Pierre Couturier, qui accompagne les startups de Neoloji. Tout dépend aussi si le projet est de créer une filiale ou juste d’exporter. » Avec l’exemple, à une tout autre échelle, de Stellantis. Le géant automobile n’a-t-il pas annoncé un investissement de 5Md$ aux Etats-Unis pour contourner les droits de douane américains ?


Spécialiste de « l’impact des technologies numériques sur la façon de se développer à l’international », Olga Chevé (Adekvat conseil), s’inquiète plus d’une autre annonce américaine : les 500Md$ du projet « Stargate » 
dédié au développement de l’IA, « alors que la France y consacre… 2,5Md€ ». Or « les technologies numériques offrent une rapidité de réflexion pour saisir des opportunités commerciales plus rapidement. Pour la France, ce serait donc la double peine : une hausse des droits de douanes et une perte de compétitivité ».


(*)Source Centre d’études prospectives et d’information internationale.


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