Hier
Peu scolaire en raison de sa dyslexie, Louise Veneris a très tôt trouvé dans l’art un moyen d’expression à sa mesure. Son troisième livre illustré, La Grand’Goule, propose une visite originale du musée Sainte-Croix de Poitiers.
Elle a beau avoir les yeux qui vrillent, une langue bifide digne de ses cousins les dragons et de petites canines acérées, la Grand’Goule dessinée par Louise Veneris est plutôt attendrissante. Seulement voilà, la petite dragonne peine à exister au milieu des peintures et sculptures du musée Sainte-Croix de Poitiers. Pas toujours facile de se faire accepter. Louise a connu ça et, comme sa Grand’Goule, elle a fini par trouver sa place… au musée elle aussi ! Depuis dix ans, la Poitevine y assure l’accueil. « Ce lieu m’a ouvert à la culture. Et à la lecture !, s’exclame-t-elle. C’est le seul endroit où je viens sans boule au ventre, je n’avais jamais ressenti ça avant. Ce livre est en quelque sorte un remerciement. » Plus encore que pour les deux précédents, Comment oublier son Grand Amour (2021) et Mon Enfance à Luchapt (2022), la jeune femme a hésité à le publier, failli renoncer, tout particulièrement parce qu’il s’adresse à un jeune public. « Je suis dyslexique, confie-t-elle. J’ai toujours été en échec scolaire car je n’aimais ni lire ni écrire. » Alors signer un livre pour enfants quand ses souvenirs de lecture ne sont que douleur… « Je me sentais coupable à l’idée que des enfants se forcent à lire mon livre et pleurent autant que moi je pleurais… » Louise s’est donc appliquée à en faire un objet attrayant, sans monolithe de mots mais au contraire des suggestions de jeux, des « astuces dys » et de jolies illustrations à l’aquarelle.
Un pseudo pris au musée
« J’ai toujours eu un côté artistique. Mon seul regret est de ne pas avoir pu suivre le parcours des Beaux-Arts, à cause de ma dyslexie. » Néanmoins, de 7 à 11 ans, la fillette a pris des cours avec Jean-Pierre Nessler. « Il m’a tout appris, la gouache, l’encre de Chine, le dessin, la sculpture, le pastel. Il n’y avait que là où je me sentais douée ! J’ai remporté plusieurs concours de peinture. » Son trouble du langage écrit a transformé sa scolarité en « parcours du combattant » et l’a menée vers un BEP couture, puis à un Emploi d’avenir au musée. « Un pur hasard » qui, lorsqu’elle n’expose pas ici et là ses propres toiles à l’univers coloré et onirique, la ravit au quotidien. « Je rencontre des artistes, j’aide à installer les expos, j’écoute les visites guidées pour les adultes et pour les enfants. » On retrouve ainsi dans La Grand’Goule les œuvres qui ont la faveur des plus jeunes, Toutoum (le chien), Athéna, la Petite Fille en rouge du Poitevin André Brouillet ou encore le chapiteau de la dispute qui serait à l’origine du jeu de la barbichette. De sa première visite au musée à l’âge de 6-7 ans, Louise Renaud a, elle, conservé un mot, Veneris. « Devant un bracelet de l’Antiquité -qui est toujours exposé !-, le cousin qui nous accompagnait avait inventé l’histoire d’une petite fille. C’est devenu très tôt mon pseudo d’artiste. Ce n’est que plus tard que j’ai appris qu’il était lié à Venus. »
La Grand’Goule, de Louise Veneris, 72p., 13,72€, disponible en ligne et peut-être bientôt à la boutique du musée et dans d’autres points de vente de Poitiers. Exposition jusqu’en avril Au mi-SaGaBou, avenue du 8 Mai.
À lire aussi ...
lundi 23 décembre