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De plus en plus de particuliers troquent leur voiture ou leur moto contre une trottinette électrique. Les deux-roues se démultiplient en ville et dans l’agglo, avec des problèmes de sécurité à la clé.
Il y a un mois, Christopher a vendu sa moto, une 50cc Derby, pour s’acheter une trottinette électrique « plus économique ». Il emprunte tous les jours la RD910 entre Poitiers et Chasseneuil, où il travaille dans la restauration. « Mais j’ai gardé mon blouson, mon casque et mes gants ! », tient-il à préciser. Le jeune homme a conscience du danger qui le guette, même en serrant au maximum à droite sur la chaussée. « Ce serait bien d’avoir davantage de pistes cyclables », avance-t-il. Faute d’espaces réservés, les usagers du plateau comme des boulevards urbains sont forcés de cohabiter... et force est de constater que les « trott’ » se démultiplient sur le pavé poitevin. Selon la Fédération française des professionnels de la micro-mobilité (FP2M), les chiffres de vente ont grimpé à 908 000 unités en 2021 contre 640 000 en 2020.
« On observe aujourd’hui un changement net des motivations des utilisateurs qui sont de plus en plus nombreux à avoir recours à la trottinette électrique pour des déplacements domicile-travail réguliers ou quotidiens. C’est moins cher qu’un vélo électrique et pratique à emporter dans une voiture ou un train », explique Grégoire Henin, vice-président de la FP2M. Jean-Baptiste Laye acquiesce. L’ancien agent immobilier a ouvert son atelier de réparation -OGC Trotte Shop- en haut de la Grand’Rue, à Poitiers. Depuis juin, sa boutique ne désemplit pas. « Il m’est arrivé de vendre jusqu’à trois trottinettes par jour alors que je tablais sur trois par mois dans mon business plan », reconnaît le dirigeant. Même (sur)activité côté réparation. Il est le premier à proposer ce genre de services dans la Vienne. « Certains de mes clients allaient jusqu’à Tours, Angers ou Paris pour faire changer un pneu ! »
Une législation trop permissive ?
Si le marché est florissant, avec des engins de plus en plus sophistiqués et autonomes, jusqu’à 150km, la réglementation semble encore « légère ». La preuve, plusieurs accidents mortels ont émaillé l’été à Lille, Rueil-Malmaison, Chaville, en Gironde, à Nice, Lyon... Et on ne parle pas ici des collisions avec des piétons ou des chutes aux conséquences moins graves. Dans la Vienne, 16 accidents ont été recensés depuis le 1er janvier contre 10 sur l’ensemble de 2021.
De fait, beaucoup d’usagers ne portent ni casque (il est seulement conseillé) ni gilet réfléchissant et fréquentent des axes non autorisés, comme les trottoirs par exemple. Le décret n° 2019-1082 du 23 octobre 2019 stipule que les engins de déplacement personnel ont « obligation de circuler sur les pistes et bandes cyclables lorsqu’il y en a, à défaut, sur les routes dont la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à
50km/h. » Au-delà, la vitesse maximale est fixée à 25km/h, mais beaucoup débrident leur deux-roues, qui doit aussi être assuré. La préfecture de la Vienne reconnaît que la réglementation est encore
« trop méconnue » et assure que « des actions de communication sont planifiées ». Un groupe de sénateurs veut carrément rendre obligatoire l’immatriculation de ces véhicules terrestres à moteur. « J’ai l’impression que la trottinette va être la bête noire des prochaines années, regrette Jean-Baptiste Laye. S’il y avait davantage d’aménagements, ce serait un bon début... » De son côté, Grégoire Henin préconise de de rehausser l’âge de 12 à 14 ans. « Pour le reste, la trottinette n’est pas plus dangereuse qu’un vélo élecrique. »
Vice-président de la Fédération française des professionnels de la micro-mobilité (FP2M), Grégoire Henin insiste sur la nécessité de sensibiliser les usagers de la trottinette.
Quelles sont les prévisions de vente de trottinettes électriques en 2022 ?
« Nous devrions atteindre le million d’unités vendues cette année, alors que nos prévisions portaient sur 900 000 à l’horizon 2024-2025 ! »
Qu’est-ce qui explique cet engouement ?
« Cela répond à un besoin de nouvelles mobilités au quotidien, de la part de populations précises. Les trottinettes permettent d’entrer dans une logique multimodale, avec le train, le bus, le métro ou le co-voiturage avant ou après le trajet en trottinette, laquelle est plus facile à mettre dans un coffre qu’un vélo. La différence de coût explique aussi en partie l’explosion des ventes. »
La réglementation est-elle encore adaptée ?
« Je pense qu’elle l’est, oui. On s’inscrit dans les pas du vélo, sauf en dehors des agglomérations où il existe des ruptures de pistes cyclables. J’invite les collectivités à multiplier les infrastructures. Au-delà, il faut peut-être remonter l’âge minimal de 12 à 14 ans. Le casque ? Encore une fois, la trottinette n’est pas plus ou moins dangereuse que le vélo. On ne favorise pas l’obligation. »
Pourtant, on constate une multiplication des accidents, parfois mortels...
« Cette hausse va avec la multiplication du nombre d’utilisateurs mais il n’y a pas d’explosion en termes de pourcentage. L’usage est encadré, faisons appliquer la réglementation ! Avec la FP2M, nous faisons beaucoup d’opérations de sensibilisation avec la prévention routière. Ne pas être à deux sur une trottinette, respecter la signalisation... Tout cela est important. Mais attention à ne pas tomber dans un trottinette bashing. »
Que pensez-vous du projet sénatorial d’apposer une plaque d’immatriculation sur les trottinettes ?
« Ça n’apportera pas grand-chose, l’immatriculation ne permettra pas de réduire le nombre d’accidents. Cela entraînera aussi des coûts supplémentaires pour l’Etat. Et il n’y a aujourd’hui aucune solution viable pour flasher une immatriculation de 7x7cm... Misons d’abord sur la prévention et la formation avant de vouloir réprimander. »
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jeudi 21 novembre