Aujourd'hui
Après avoir passé un scanner au CHU de Poitiers en juin dernier, la Grand’Goule, sculpture emblématique de Poitiers conservée au musée Sainte-Croix, est actuellement entre les mains d’une restauratrice d’art. Objectif : lui permettre de traverser plusieurs siècles encore.
Elle a 345 ans, quelques dents cariées par le temps, des rides un peu trop profondes, un sourcil en moins, de la crasse en trop… Si la Grand’Goule a vaillamment traversé les âges, la sculpture en bois réalisée en 1677 par Jean Gargot, à la demande des sœurs de l’abbaye Sainte-Croix, avait bien besoin d’une petite cure de jouvence. Après avoir subi un scanner au CHU de Poitiers en juin dernier, la voilà cette semaine sur la « table d’opération » d’Emmanuelle Sédille, une restauratrice d’art tourangelle spécialisée dans les sculptures en bois et en pierre.
« C’est un peu notre mascotte, elle est déclinée sur de nombreux supports mais on observait des désordres structurels, des fentes, des éléments métalliques qui avaient joué avec le temps et l’humidité. Des manques et des comblements aussi, explique la conservatrice du musée Sainte-Croix Raphaële Martin-Pigalle. Il nous paraissait important de lui rendre son lustre et d’en apprendre davantage sur son histoire. » Car aussi étrange que cela puisse paraître, le « dossier médical » de la Grand’Goule est quasiment vide. Au-delà de la légende, tout reste donc à découvrir sur la manière dont la sculpture a traversé les âges. Et l’analyse des matériaux utilisés pour la restaurer comme les différentes couches picturales, de vernis et/ou de cire qui l’habillent sont autant d’indices sur son histoire.
Polychromies
Armée de petits morceaux de coton qu’elle fixe au bout d’un bâtonnet et imbibe de différents produits selon la zone ciblée, Emmanuelle Sédille nettoie doucement sa « patiente » afin de révéler les subtilités de ses polychromies. Des prélèvements vont être envoyés vers le Laboratoire d’analyse des matériaux et des objets d’arts (LAMOA) de Bordeaux pour permettre de faciliter la datation des différentes « interventions » qu’elle a subies. « Parce qu’ils seront nécessairement invasifs, les échantillonnages devront être rares et signifiants », note Raphaële Martin-Pigalle.
L’imagerie réalisée au CHU a déjà montré que l’œuvre, entrée au musée en 1909, a été taillée dans une même pièce de bois puis évidée. L’examen a aussi révélé ses fragilités, notamment une fente sous son anneau dorsal qui rend périlleuse toute suspension. Fini le temps des processions en l’honneur de sainte Radegonde, le 13 août de chaque année ! La Grand’Goule n’est plus aussi alerte et Pauline Laforêt, la régisseuse d’œuvres d’art du musée, manie ses quelque 40kg avec moult précautions lors de ses rares déplacements. Le reste du temps la sculpture guette les visiteurs à la sortie de la galerie des enfants. Elle y sera de nouveau la semaine prochaine, en attendant d’autres « opérations » programmées en septembre et bientôt de nouveaux supports pédagogiques en lien avec sa restauration.
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