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La Grand Muraille verte, là où s’écrit l’avenir
Catégories : Société, Développement durable Date : mardi 29 mars 2022Le Regard de la semaine est signé Didier Moreau.
Sénégal, Widou Thiengoly. Latitude : 14,5 - Longitude : 14,25. C’est là où tout a commencé. Tout ? Un tout gigantesque, oui. Un chantier titanesque mené en mode fourmi pour reboiser la zone subsahélienne avec onze pays concernés, Sénégal, Mauritanie, Mali, Niger, Nigeria, Tchad, Soudan, Érythrée, Éthiopie, Somalie, Djibouti.
7 100km de long, 15km de largeur, le travail à réaliser est inédit, plus de 100 000km², à la mesure du défi environnemental, culturel, économique. Des enjeux vitaux pour des millions d’habitants. Hectares après hectares sont ainsi plantés, de quoi constituer à terme un ensemble d’écosystèmes reliés entre eux permettant de fixer non seulement les sols, la flore, les plants et plantes adaptés, mais également l’activité et redonner ainsi l’espoir et des raisons de vivre localement, décemment, dans la dignité.
Le travail engagé en 2008 permet de créer des parcelles protégées, qui donnent de la paille vendue juste avant la saison des pluies. Au fil des espaces ainsi conquis, sont créés des jardins polyvalents, associés aux pépinières où sont préparés les plans. Dans chaque jardin de 5 à 7 hectares, participent 250 femmes en moyenne. L’agence sénégalaise prévoit de les transformer à terme -avec l’accord des habitants, des maris éleveurs, en particulier en fermes coopératives de 20 hectares qui seront gérées par des associations de femmes.
Aujourd’hui, ont été plantés 65 000 hectares mais la sécheresse ne facilite pas les choses. Les plants qui ont survécu deux années sont « sauvés ». La première année, seul un plant sur deux « survit ». Les difficultés sont innombrables, au premier chef la ressource en eau, mais l’expérience est instructive, les plantations donnent maintenant du travail bien payé localement, avec près de 1 000 emplois pour la partie sénégalaise du parcours. Les produits forestiers comme le soup issu du Balanites Aegyptiaca, appelé aussi dattier du désert, ou la gomme arabique produite par l’Acacia Sénégal, qui possède une véritable richesse commerciale. Du miel est en train d’être produit, à très petite échelle pour l’instant, tout comme du savon déjà commercialisé localement. Que des petites choses, autant de petites victoires à valoriser.
La grande originalité de ce projet est d’être porté par une communauté scientifique panafricaine, l’observatoire homme-milieu Téssekéré, qui a tissé un lien singulier et fécond avec des équipes du CNRS dans une coopération solide depuis 2008. Il faut les aider, les accompagner dans le futur, car ce projet ne peut échouer ! Il est de surcroît un laboratoire du changement environnemental pour l’Europe. On ne pourra pas dire que l’on ne savait pas ce qui naît sur cette partie du monde. Latitude : 11.299253 - Longitude : 42.711365. Djibouti, là où tout doit arriver.
CV express
Formé à l’université de Poitiers avec une double compétence économique et scientifique, je suis directeur de l’Espace Mendès-France depuis mai 1991. Mes responsabilités nationales dans la culture scientifique et mon expérience d’élu local m’ont apporté beaucoup. J’accompagne avec bonheur les projets de mon ami Edgar Morin, des acteurs de la Grande Mu- raille verte et du Pacte mondial des jeunes pour le climat.
J'aime : Victor Hugo, Montaigne, la Louisiane, Quentin de la Tour, la politique, les jardins remarquables, les enthousiastes, Jules Verne, la pierre du Périgord noir, la convivialité.
J'aime pas : les mégots de cigarettes, le simplisme, les péremptoires, la vindicte, l’individualisme, les impatients congénitaux.
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