Institut Robuchon : un si long silence

Parmi les proches du dossier, personne pour se hasarder à cocher une date. Dans la population, rares sont ceux qui y croient encore. Initialement, l’Institut international Joël Robuchon était censé ouvrir dans la maison-Dieu de Montmorillon en… 2017.

Claire Brugier

Le7.info

« Le projet reste une priorité pour la famille. » Des mots, encore des mots, toujours des mots… L’Institut international Joël Robuchon verra-t-il enfin le jour dans la maison-Dieu de Montmorillon ? Depuis cinq ans, les rangs des sceptiques n’ont cessé de grossir. Ils sont désormais à la mesure du projet de 65M€ que le chef le plus étoilé au monde avait présenté un soir de novembre 2015 au Bristol, à Paris. Ils sont aussi à la mesure du silence qui a suivi son décès à l’été 2018 (lire p. 4). « Le projet reste une priorité pour la famille, répète à l’envi Catherine Barrier, la voix de la famille Robuchon. Le contexte actuel, avec la crise de la Covid-19, les tensions internationales, les mutations du tourisme, les complications juridiques, ne permet pas un calendrier tel que souhaité, mais la redéfinition du projet va s’achever d’ici quelques semaines. » 

« Nous laisser du temps »

Parmi les partenaires de la première heure, on reste laconique. Au nom de l’Ecole hôtelière de Lausanne, le MOF Philippe Gobet, son chef exécutif, renvoie poliment la communication vers Catherine Barrier. « Il faut nous laisser du temps, ça avance », assure de son côté Régis Marcon. Le chef étoilé évoque simplement « une pédagogie innovante, plus efficace, et un rapport plus étroit avec les domaines de l’agriculture et de la santé ». Il mentionne, pour la formation au service, « des cours de théâtre et de cirque pour expliquer un plat ».  Rien que des bribes d’un secret bien gardé. 

« Il n’y a pas de remise en cause du projet, il y a simplement des difficultés techniques liées à des contentieux juridiques relatifs à la succession », assénait encore en février dernier, sur site, l’ex-Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, l’un des instigateurs du projet. Il fait partie des rares Poitevins à y croire encore, avec dans ses pas le sénateur Yves Bouloux. « A ma connaissance, Sophie Robuchon est tout à fait impliquée sur le sujet. » Quant à Martine Jammet, vice-présidente de la CCI de la Vienne et cousine de Joël Robuchon, elle préfère s’abstenir de tout commentaire.

« Les Chinois se sont désinvestis »

En mairie de Montmorillon, la pochette dédiée au projet ne contient que le premier permis de construire et la demande de renouvellement déposée le 13 mai dernier par Z2W, une holding chinoise présidée par Wu Zhong. Or, « les Chinois se sont désinvestis, assure Reine-Marie Waszak, à l’instar d’autres observateurs. La famille recherche désormais des investisseurs américains. » La vice-présidente de Région, par ailleurs première adjointe à Montmorillon, précise que « la Région ne s’impliquera que dans un internat d’excellence. Mais, au niveau municipal, nous n’avons plus d’espoir sur ce projet. » 

Le maire Bernard Blanchet nuance. « Le projet serait encore d’actualité. Bien sûr, la maison-Dieu est un bâtiment emblématique de notre commune et nous sommes prêts à aider à concrétiser un projet privé sur ce lieu. » Au sein de son équipe, d’aucuns imaginent un achat par la commune, quitte à en revendre une partie à des investisseurs privés, pour y développer, pourquoi pas, des activités en lien avec la silver économie, un lycée de la deuxième chance dédiée aux métiers en tension, une salle de spectacle... Bernard Blanchet récuse en bloc l’idée. « Il n’a jamais été question que la municipalité rachète ce bâtiment ! »  

L’imposante bâtisse et ses jardins sont toujours la propriété du CHU de Poitiers. En 2008, les Domaines avait estimé l’ensemble à 2,2M€. « Mais dernièrement le montant a baissé », glisse le maire. Du côté du CHU, motus et bouche cousue. « Nous n’avons rien à dire sur le prix », tranche le service communication, assurant par ailleurs que « des discussions sont en cours ». Des paroles, toujours des paroles…

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