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Bien armé face à la sécheresse, le sorgho se fait une place dans les campagnes poitevines. Mais son prix de vente reste faible. A défaut d’une filiale dédiée à la consommation humaine, cette plante intéresse les éleveurs pour nourrir les animaux.
Dans la Vienne, les producteurs rattachés à la coopéra- tive de La Tricherie ont consacré deux fois plus de surfaces au sorgho en 2020 que l’année précédente. Le chiffre démontre une vraie tendance. Toutefois, la plante originaire d’Afrique part de loin. Sur les 22 000 ha exploités, seuls 700 ha sont aujourd’hui dédiés au sorgho. En 2018, le rapport Acclimaterra commandé par la Région Nouvelle-Aquitaine faisait l’éloge de cette culture pour assurer des productions dans un contexte de réchauffement climatique (lire ci-dessous). Preuve en est qu’elle a du mal à s’imposer face au maïs tout-puissant.
« On aimerait bien qu’une filière s’organise. Mais il n’y a pas de communication positive sur les produits à base de sorgho », regrette Baptiste Breton, co-directeur de la coopérative poitevine. Parmi les rares exemples de transformation, un exploitant a décidé de fabriquer sa propre farine destinée à la consommation humaine qui a l’avantage d’être garantie... sans gluten. « Le sorgho pâtit d’une mauvaise image auprès des agriculteurs car son prix de vente est décoté par rapport au maïs », reprend le dirigeant. La concurrence fait rage. Produit, machines, méthodes de transformation... Le maïs est connu sur le bout des doigts par les professionnels du secteur. Les coûts sont maîtrisés. Pour le sorgho, c’est plutôt l’inverse.
En revanche, les éleveurs apprécient particulièrement ses qualités. Le sorgho va pouvoir attendre les précipitations de fin d’été-début d’automne pour grandir quand le maïs commence à noircir. « Il est intéressant en complément du maïs pour que l’agriculteur ne mette pas tous ses œufs dans le même panier par temps de sécheresse », explique Aloïse Célerier, conseillère à la chambre d’agriculture de la Vienne. La quantité de fourrage est assurée. Actuellement, ce qui est planté est auto-consommé pour nourrir les bêtes. Le sorgho blanc est spécifiquement dédié à l’oisellerie. A Marnay, une plateforme de test ouvre ses portes aux exploitants qui souhaiteraient se lancer dans le sorgho.
En 2018, 240 experts en tout genre se sont demandé quels impacts les changements climatiques vont avoir sur les activités humaines menées en Nouvelle-Aquitaine (Le 7 n°404). Nom de code : Acclimaterra. En agriculture, ils ont insisté sur les vertus du sorgho. « Ses racines lui permettent de prélever plus d’eau et d’azote dans le sol. Il atteint plus facilement son rendement potentiel que le maïs en situation sèche », note Jean-Louis Durand, directeur de l’unité de recherche pluridisciplinaire prairies et plantes fourragères à l’Inra de Lusignan, qui faisait partie du groupe d’experts. Evidemment, il a moins besoin d’irrigation. Reste que deux ans après le rapport, le sorgho peine à s’imposer, comme si l’économie cherchait toujours à dicter sa loi à la nature.
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