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Le loup aurait été vu le 20 janvier à Gurat (Charente), le 30 janvier à Lathus, le 3 février à Chasseneuil (Indre)... Ils seraient près de cinq cents en France. Géographe spécialiste des loups, membre du laboratoire Ruralités de Poitiers, Farid Benhammou dépassionne volontiers le débat.
Le loup avait disparu d’Europe de l’Ouest. Comment expliquer son retour ?
« Il avait disparu car on a tout fait pour. A partir du XIXe siècle, on a mis en place un plan d’éradication avec armes à feu, poisons, pièges, ainsi qu’un système de primes très intéressant. Les campagnes étaient plus peuplées, le milieu naturel moins riche en faune sauvage. Il est revenu parce qu’il est protégé. Le premier témoignage visuel de son retour en France date du 5 novembre 1992, dans le Mercantour. »
Qu’est-ce que le retour du loup traduit comme changement dans l’environnement ?
« Cela révèle des changements sur le plan écologique, mais aussi social et politique. Au niveau écologique, même si on constate une régression généralisée de la biodiversité, cela confirme que les populations de certains animaux s’améliorent (cerfs, chevreuils, sangliers). Le retour du loup reflète une reconstitution des écosystèmes. Il traduit aussi des modifications sociales. Avec la Convention de Berne en 1979 et la directive européenne Habitat de 1992, le loup est passé de nuisible à espèce protégée. »
L’Homme et le loup peuvent-ils cohabiter dans la société actuelle ?
« Le loup peut représenter une forte contrainte pour l’activité agricole, d’autant qu’il arrive comme une goutte d’eau qui fait déborder le vase dans une période déjà pas évidente. En France, ce sont plus de 12 000 brebis qui font l’objet d’une indemnisation chaque année, ce n’est pas anecdotique. C’est compliqué mais des solutions existent : des chiens de protection, des clôtures électrifiées et, surtout, la présence humaine. Il faut repenser les systèmes. Rejeter le loup, c’est comme rejeter l’orage ou la grêle. »
Quid du Plan national sur le loup et les actions d’élevage 2018-2023 ?
« D’un côté, ce plan réaffirme la protection du loup, de l’autre il est dangereux car il considère que pour réduire la prédation, il faut moins de loups. Or, le mieux est de tirer sans tuer car un loup apprend, sa peur est communicative. Un loup mort n’apprend rien. »
Pensez-vous que l’image du loup ait changé ?
« Oui et non. Certes, il y a le gentil loup des contes pour enfants, le loup écolo des milieux environnementalistes, mais l’ignorance subsiste, comme certaines représentations. Exemple : la campagne contre le harcèlement sexuel lancée en 2018 par la RATP dans le métro de Paris, qui représentait des jeunes femmes confrontées à des prédateurs. Lesquels ? Des loups, un ours, un requin... Dans l’inconscient collectif, le grand méchant loup existe toujours. Le Petit Chaperon rouge, les Trois Petits Cochons restent des classiques. On parle souvent du loup dans Les Fables de La Fontaine, mais son image n’y est pas univoque. Selon la fable il est prédateur (Le Loup et l’agneau), victime (Le Loup et les bergers), il représente la liberté (Le loup et le chien)... »
Concrètement, le loup peut-il être un danger pour les promeneurs ?
« Sincèrement, non. Le loup a vu beaucoup plus de gens que de gens ne l’ont vu. C’est un animal très discret. S’il ne se sent pas particulièrement menacé, il peut se laisser voir. »
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Patricia Thoré, l'amie des bêtes
Patricia Thoré « de la Maraf ». 67 ans. Originaire de Rochefort, arrivée dans la Vienne en 1998. Ancienne militaire de carrière aujourd’hui responsable de la Maison d’accueil et de retraite des animaux de la ferme, à Salle-en-Toulon. Amie des bêtes et femme de conviction.