
Aujourd'hui
Ô temps, suspends ton vol…
L'édito de la semaine est signée Nicolas Boursier.
Qui l’eût cru ? En novembre 2018, un sondage indiquait que plus d’un maire sur deux ne se représenterait pas en mars 2020. Nous y sommes presque et la réalité de notre consultation de terrain (*), réalisée en partenariat avec France Bleu Poitou et l’Association des maires de la Vienne, donne une autre tonalité. Selon l’association, 66% d’entre eux devraient briguer un nouveau mandat les 15 et 22 mars, sachant que certains sont encore indécis. On est loin de l’abandon en rase campagne annoncée par les Cassandre de la capitale. Celles et ceux qui raccrochent le font avant tout pour des questions d’âge ou de santé. « J’avais fixé une limite à 70 ans, des gens plus jeunes avec d’autres idées sauront administrer le village. Il me reste peut-être dix ans en bonne forme, je veux les consacrer à autre chose », confie le maire d’une commune de 1 300 habitants.
« A quoi servons-nous ? »
Un autre édile (de gauche) arrête pour des raisons plus politiques. « La loi NOTRe nous a éloignés de nos compétences et du pouvoir de décision. A quoi servons-nous ? », interroge-t-il, amer après vingt-cinq ans de mandat. « A quoi servons-nous sinon de fusible ? », abonde un autre. Un troisième, du Sud-Vienne, renchérit sur l’intercommunalité qui « ne laisse pas assez de pouvoir et de financements » aux petites communes. « L’absence de lisibilité sur l’avenir de nos villages couplé à un manque d’aide d’autres élus me pousse à arrêter », enfonce un quatrième élu du Civraisien. Poids des communautés de communes, des normes, relations difficiles avec les administrés « qui nous demandent de régler des conflits privés sans faire l’effort de dialoguer avec leurs voisins », gestion du personnel, attaques personnelles... Si certains en ont ras l’écharpe tricolore, beaucoup d’autres se réjouissent de briguer un nouveau mandat.
« Savoir aussi dire non »
Ils et elles le reconnaissent cependant : la fonction réclame beaucoup de « disponibilité », de « diplomatie », d’« écoute », de « tolérance » et de « bienveillance ». « Sans compter qu’il faut être bon gestionnaire et avoir des idées pour faire avancer sa commune », estime un poids lourd de la communauté urbaine de Poitiers. Le message vaut pour les futurs premiers de corvée ! « Il faut aussi savoir déléguer et dire non pour ne pas être l’irremplaçable de service », témoigne un maire d’un village du Châtelleraudais. Au final, beaucoup admettent que le mandat a été « difficile », mais ne renoncent pas à leur engagement. La reconnaissance publique est sans doute au prix de ce dévouement désintéressé.
(*) 102 maires de communes de toutes tailles sur 266 ont répondu à notre enquête exclusive entre le 7 et le 28 janvier. A écouter aussi sur France Bleu Poitou l’émission « 2 minutes pour comprendre ».
A lire : notre dossier complet
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