Retraites : le big bang social

La CGT, Force ouvrière, la FSU, Solidaires et la Fédération autonome de la Fonction publique appellent à descendre dans la rue jeudi, pour protester contre la réforme des retraites. Une réforme « très ambitieuse mais quasiment utopique » pour l’économiste poitevin Stéphane Mottet, spécialiste du sujet.

Arnault Varanne

Le7.info

« Non à la retraite par points ! » Le mot d’ordre est clair, fédérateur et nul doute que beaucoup de salariés du privé et de fonctionnaires l’entonneront jeudi dans les cortèges, à Poitiers -14h, porte de Paris-, comme à Châtellerault, où le départ s’effectuera de la zone Nord à 10h. La journée du 5 décembre devrait être très fédératrice. « Pas un seul secteur professionnel, privé ou public, pas un seul salarié, actif, chômeur, retraité, apprenti, ne serait épargné par l’impact inacceptable et dévastateur de cette contre-réforme gouvernementale », s’indigne l’intersyndicale. Laquelle accuse le gouvernement de vouloir « baisser le montant des retraites » et de « mettre sous tutelle du Parlement le montant à la hausse ou à la baisse du point sur des considérations budgétaires et financières ». « L'ampleur de la mobilisation de jeudi sera un élément, mais la capacité à mobiliser dans les entreprises sera aussi importante », estime Catherine Giraud, secrétaire générale de la CGT 86. 

Du côté de la majorité, on fait bloc. Député de la 2e circonscription de la Vienne, Sacha Houlié indique que « le régime universel par points profitera à 40% des plus modestes. Nous serons attentifs à ce que les gens diront jeudi, mais beaucoup savent que cette réforme est la seule possibilité d’avoir une retraite préservée demain et après-demain. » Le parlementaire LREM s’inquiète en revanche du sort des enseignants, dont certains syndicats prédisent une perte mensuelle de… 800€. « Il faut trouver des choses pour eux, revaloriser leur rémunération… »

« L’enjeu est sur les modalités de calcul de la pension »

Enseignant-chercheur à l’IAE de Poitiers, Stéphane Mottet résume l’équation en une formule bien sentie. « L’idée d’un régime universel par points, c’est presque un idéal. Si on pouvait faire table rase du passé, ce serait le meilleur système à mettre en place. Il est lisible, équitable, transparent et compréhensible. Sauf qu’on hérite d’un système avec un régime général et quarante-deux autres. » L’économiste poitevin a travaillé quatre ans avec des collègues d’Orléans et de Dijon sur les conséquences des précédentes réformes, en particulier celles de 1993 et 2003. Bilan : « Il est presque impossible de comparer les régimes tellement chacun est particulier, notamment en cas de polyactivités. » Stéphane Mottet salue donc « l’ambition de la réforme » -« l’une des plus importantes sur le plan social des soixante-dix dernières années »- mais doute de la capacité du gouvernement à aller au bout. Notamment en raison des « périodes de transition que nécessite sa mise en place ».

« En l’état actuel, il est très difficile de savoir qui gagne et qui perd. Lors des précédentes réformes, on a touché au régime général, à la fonction publique, aux régimes spéciaux, à la durée de cotisation. Là, on s’attaque à tous les paramètres,
renchérit l’économiste. Mais pour moi, l’enjeu est vraiment sur les modalités de calcul de la pension. »

Montant des cotisations, des pensions, durée de cotisation, âge de départ avec ou sans décote, période de calcul de la pension (six mois ou vingt-cinq ans ?)… Après des mois de consultation, en particulier du haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye, le Premier ministre annoncera les arbitrages avant Noël. A moins que ce calendrier soit bousculé par la rue…  

 

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